Les nuages gris qui planent au-dessus de Calgary cette semaine racontent une histoire que de nombreux résidents redoutent depuis 2013. Les prévisions d’Environnement Canada annoncent jusqu’à 100 millimètres de pluie d’ici lundi – des chiffres qui ont poussé les responsables municipaux à mobiliser des mesures préventives tout en évitant d’alarmer inutilement la population.
« Nous prenons cette situation très au sérieux, mais nous ne paniquons pas », déclare Sandra McKenzie, coordinatrice de la gestion des urgences de Calgary, lors d’un point presse organisé à la hâte hier à l’Hôtel de Ville. « Il s’agit de préparation, pas de prédiction. »
Les souvenirs des inondations dévastatrices de 2013, qui ont causé plus de 5 milliards de dollars de dégâts dans le sud de l’Alberta, restent vifs pour de nombreux Calgariens. En marchant le long du sentier de la rivière Bow hier matin, j’ai croisé de nombreux résidents discutant des prévisions du week-end, mêlant inquiétude et résilience.
« On remarque que tout le monde consulte les applications météo plus fréquemment », observe Carol Jennings, résidente de Sunnyside qui a perdu son sous-sol lors des inondations il y a onze ans. « Nous avons appris à observer le ciel différemment depuis 2013. »
Les équipes municipales déploient des barrières temporaires le long des sections vulnérables des rivières Bow et Elbow depuis jeudi. L’Agence de gestion des urgences de Calgary (CEMA) a activé son centre d’opérations au niveau 1, le niveau le plus bas de réponse d’urgence, principalement axé sur la surveillance et la préparation.
Les débits actuels de la rivière Bow sont d’environ 270 mètres cubes par seconde – bien dans les normes printanières habituelles selon les données d’Environnement et Aires protégées de l’Alberta. Cependant, avec des sols déjà saturés en raison d’un printemps inhabituellement humide, la capacité d’absorption a considérablement diminué.
« La combinaison des précipitations prévues et de l’humidité actuelle du sol nous incite à aborder ce week-end avec une prudence appropriée », explique Dr. John Pomeroy, professeur d’hydrologie à l’Université de Saskatchewan et directeur du Centre d’hydrologie, joint par téléphone. « Ce n’est pas seulement une question de quantité totale de pluie, mais aussi de timing, d’intensité et de l’endroit précis où elle tombe dans le bassin versant. »
La mairesse Jyoti Gondek a abordé ces préoccupations lors d’une apparition médiatique improvisée jeudi, soulignant les améliorations apportées depuis 2013. « Nous avons investi plus de 150 millions de dollars dans des infrastructures de prévention des inondations qui n’existaient tout simplement pas il y a onze ans », a-t-elle noté en visitant les bermes temporaires installées à Bowness. « Du projet de réservoir hors cours d’eau de Springbank aux améliorations au niveau communautaire, Calgary est aujourd’hui beaucoup mieux positionnée. »
Les prévisions ont suscité des réactions mitigées parmi les commerçants des zones inondables. Le long de Memorial Drive, certains propriétaires déplaçaient leurs stocks vers des étagères plus hautes par précaution, tandis que d’autres poursuivaient leurs activités normalement.
« On ne peut pas arrêter les affaires chaque fois qu’on prévoit de la pluie », affirme Miguel Rojas, propriétaire d’un café à Kensington qui a été inondé en 2013. « Mais ce serait insensé de ne pas avoir un plan prêt. Nous avons des pompes, des sacs de sable à l’arrière, et le personnel sait exactement ce qui doit être déplacé si les alertes s’intensifient. »
Le Centre de prévision des rivières de l’Alberta n’a pas encore émis d’avis formels pour la région de Calgary, bien qu’ils aient indiqué suivre de près l’évolution de la situation. Leurs modèles de bassin versant suggèrent que, malgré les précipitations importantes attendues, les capacités actuelles des réservoirs et les infrastructures améliorées devraient gérer les volumes anticipés.
La Ville de Calgary a envoyé des communications ciblées aux communautés les plus à risque, notamment Bowness, Sunnyside, Inglewood et Riverbend. Les associations communautaires ont activé leurs propres réseaux, démontrant la préparation aux urgences qui s’est développée au niveau local depuis 2013.
« Nous avons maintenant des systèmes de voisin à voisin », explique Regan Williams, président de l’Association communautaire de Bowness. « Des chaînes téléphoniques aux plans de partage d’équipement. C’est quelque chose de positif qui est ressorti de la dernière fois – nous savons que nous sommes tous ensemble dans cette épreuve. »
Le service des transports de la ville a identifié plusieurs fermetures potentielles de routes qui pourraient être mises en œuvre de façon proactive, y compris des sections de Memorial Drive et de Bow Bottom Trail. Les responsables soulignent qu’il s’agirait de mesures préventives plutôt que réactives.
Pour les nouveaux arrivants à Calgary qui n’ont pas vécu la catastrophe de 2013, ce week-end représente une introduction à la relation complexe de la ville avec ses rivières. Les médias sociaux regorgent de questions de résidents récemment installés concernant les niveaux de risque et les étapes de préparation.
« Je viens d’arriver de Toronto l’année dernière », raconte Amir Khalid, qui loue un logement dans le quartier Mission. « Mon propriétaire a déposé des sacs de sable hier sans même que je le demande. C’est là que j’ai compris qu’il fallait prendre ça au sérieux. »
Les conditions météorologiques peuvent changer rapidement en Alberta, un fait bien connu des météorologues qui surveillent la situation. Les prévisions de précipitations ont fluctué tout au long de la semaine, certains modèles montrant la possibilité que le système se déplace vers le sud.
« Nous traitons avec des probabilités, pas des certitudes », prévient Blaine Lowry, météorologue d’Environnement Canada. « La confiance dans les prévisions est modérée à ce stade, et les résidents devraient rester informés via les canaux officiels à mesure que les conditions évoluent. »
Alors que les Calgariens entament un week-end incertain, l’humeur dominante semble être celle d’une vigilance prudente plutôt que de la peur. La relation de la ville avec le risque d’inondation a considérablement évolué depuis 2013, tant en termes d’infrastructures que de sensibilisation communautaire.
Le week-end à venir mettra ces améliorations à l’épreuve, espérons-le avec un impact minimal. Mais comme tout Calgarien de longue date vous le dira, quand il s’agit du temps printanier en Alberta, il vaut toujours mieux se préparer à l’inattendu – tout en espérant que ces préparatifs s’avèrent inutiles.