La lumière matinale se déverse sur le parc Vincent Massey à mon arrivée, offrant des aperçus de plumes et de rubans qui dansent dans la brise de juin. C’est le jour d’ouverture du Festival du Solstice d’été autochtone d’Ottawa, et déjà le site bourdonne d’une énergie qui semble à la fois ancienne et immédiate.
« Ce n’est pas seulement un festival—c’est un retour aux sources, » m’explique Trina Mather-Simard, directrice exécutive d’Expériences Autochtones, alors que nous passons devant des vendeurs qui installent leurs kiosques. Sa voix porte la fierté tandis qu’elle fait un geste vers la scène principale. « Il y a vingt-cinq ans, nous avons commencé avec un petit rassemblement. Regardez-nous maintenant. »
Le Festival du Solstice d’été autochtone 2024, qui se déroule du 20 au 23 juin, est devenu l’une des plus grandes célébrations de la culture autochtone dans la région de la capitale du Canada, attirant des milliers de personnes pour honorer des traditions qui précèdent largement les frontières coloniales. La programmation de cette année équilibre divertissement et éducation, offrant aux visiteurs une immersion dans les cultures des Premières Nations, des Métis et des Inuits à travers spectacles, nourriture, art et cérémonies.
Près de l’entrée, j’observe Jordan David, un artiste algonquin de Kitigan Zibi, qui arrange soigneusement ses peintures de style woodland. « Les gens viennent chercher des capteurs de rêves et trouvent plutôt de l’art autochtone contemporain, » dit-il en riant. « C’est ça l’idée—nous ne sommes pas figés dans le temps. Nos traditions évoluent tout en gardant leurs racines. »
Le festival coïncide avec la Journée nationale des peuples autochtones le 21 juin, une date d’importance astronomique choisie pour s’aligner avec le solstice d’été—le jour le plus long de l’année et une période où de nombreuses communautés autochtones se sont traditionnellement rassemblées pour célébrer.
Au pavillon culinaire, le Chef Shawn Adler prépare des ingrédients traditionnels avec des techniques contemporaines. L’arôme du saumon cuit sur planche de cèdre et du riz sauvage remplit l’air pendant qu’il démontre des méthodes de cuisson à une foule attentive. « La nourriture nous connecte au territoire, » explique-t-il en saupoudrant des assaisonnements récoltés à la main. « Quand vous goûtez ces saveurs, vous vivez notre relation avec la terre. »
Selon Statistique Canada, Ottawa-Gatineau abrite plus de 40 000 personnes qui s’identifient comme autochtones, mais beaucoup de résidents ont une compréhension limitée de leurs cultures. Le festival sert de pont, selon Mather-Simard. « Ce n’est pas seulement pour les Autochtones—c’est pour que tout le monde puisse apprendre et créer des liens. »
La composante éducative est intentionnelle. Entre les performances de chants de gorge et de danseurs de cerceaux, des ateliers sur la préservation des langues et les relations issues des traités créent des espaces de dialogue significatif. Les enfants se rassemblent dans l’espace familial où les aînés partagent des histoires qui ont traversé les générations, captivant les jeunes visages attentifs.
« Ce qui rend ce festival unique, c’est son équilibre entre célébration et éducation, » note Gabrielle Fayant, cofondatrice de l’Assemblée des Sept Générations, une organisation dirigée par des jeunes. « Les jeunes peuvent venir ici et être fiers de qui ils sont, tandis que les visiteurs non-autochtones découvrent notre résilience et nos contributions. »
Le marché présente plus de 40 artisans autochtones vendant de tout, du perlage à l’art numérique. De nombreux vendeurs participent au Programme d’accélération du marché autochtone, développé en partenariat avec Pow Wow Pitch, qui fournit un soutien au développement commercial aux entrepreneurs autochtones.
Quand je reviens en soirée, le festival s’est transformé. La lumière du feu illumine les visages alors que la scène principale accueille Silla + Rise, qui mélange le chant de gorge inuit traditionnel avec des rythmes électroniques. La foule—diverse en âge et en origine—bouge ensemble sous les étoiles qui commencent à apparaître dans le ciel qui s’assombrit.
« Nos ancêtres se rassemblaient à cette période de l’année pour célébrer le voyage du soleil, » me confie l’Aînée Annie Smith St-Georges alors que nous regardons de jeunes danseurs se préparer pour leur performance. « Maintenant, nous nous rassemblons non seulement pour honorer le passé, mais pour montrer que nous sommes toujours là, toujours en train de créer, toujours en train d’enseigner. »
Selon le Centre national pour la vérité et la réconciliation, la revitalisation culturelle est essentielle à la guérison des politiques coloniales conçues pour éradiquer les identités autochtones. Des festivals comme celui-ci jouent un rôle crucial dans ce processus, offrant visibilité et opportunités économiques tout en éduquant le grand public.
En partant, je passe devant un cercle de tambours où des joueurs de tous âges se sont rassemblés spontanément. Le battement résonne à travers le sol, remonte dans mes pieds, jusque dans ma poitrine. Un aîné me fait signe de me joindre à eux, et bien que j’hésite, sachant que mon rythme pourrait faiblir, son sourire encourageant m’attire.
« C’est ce que fait ce festival, » m’avait dit Mather-Simard plus tôt. « Il invite tout le monde à participer à la compréhension—pas seulement comme observateurs, mais comme membres d’une communauté avec des responsabilités partagées envers cette terre. »
Alors que le soleil d’été s’attarde longtemps dans la soirée, le Festival du Solstice d’été autochtone d’Ottawa démontre que la célébration peut être une forme puissante d’éducation, de connexion et, ultimement, de réconciliation. Dans une ville construite sur un territoire algonquin non cédé, ces quatre jours nous rappellent que les cultures autochtones ne sont pas des reliques du passé, mais des traditions vivantes qui continuent d’évoluer, de s’adapter et de prospérer.
Les tambours continuent longtemps après mon départ, leur rythme me suivant jusqu’à la maison comme un battement de cœur—persistant, vivant et impossible à ignorer.