Alors que la chaleur estivale s’intensifie à travers l’Ontario, les responsables de la santé publique s’inquiètent des impacts potentiels sur la santé des températures élevées prolongées. Hier après-midi, j’ai vu des personnes âgées de mon quartier lutter avec leurs sacs d’épicerie alors que le mercure grimpait à 34°C dans les corridors bétonnés de Toronto, une scène qui se répète dans plusieurs communautés de la province.
« Les maladies liées à la chaleur peuvent toucher tout le monde, mais nous sommes particulièrement préoccupés par les populations vulnérables comme les aînés, les jeunes enfants, les femmes enceintes et les personnes souffrant de maladies chroniques, » explique Dr. Melody Chen, médecin hygiéniste adjointe au Bureau de santé du district de Simcoe Muskoka.
Le bureau de santé a activé son protocole de réponse à la chaleur après qu’Environnement Canada a émis des avertissements pour la majeure partie du sud et du centre de l’Ontario, où les valeurs humidex ont atteint les 40 dans certaines régions. Cette chaleur extrême devrait se poursuivre tout au long de la fin de semaine, avec seulement un soulagement marginal pendant la nuit.
Pour de nombreux résidents ontariens, la combinaison de températures élevées et d’humidité crée des conditions dangereuses, surtout dans les zones urbaines où l’effet d’îlot de chaleur peut augmenter les températures de plusieurs degrés par rapport aux zones rurales environnantes. Une étude de 2022 réalisée par des chercheurs de l’Université de Waterloo a révélé que les îlots de chaleur urbains de l’Ontario peuvent connaître des températures jusqu’à 7°C plus élevées que les paysages naturels à proximité lors des épisodes de chaleur estivale.
« Ce qui rend cette situation particulièrement difficile, c’est que beaucoup de maisons en Ontario n’ont pas été construites en tenant compte de la chaleur extrême, » note Emma Koivistoinen, spécialiste de l’adaptation climatique au Clean Air Partnership, un organisme environnemental basé à Toronto. « Environ 20% des foyers ontariens n’ont pas de climatisation, et ces chiffres sont plus élevés dans les communautés à faible revenu. »
En réponse, les municipalités de toute la province ont ouvert des centres de rafraîchissement dans les bibliothèques publiques, les centres communautaires et les bâtiments municipaux. Toronto a activé à elle seule plus de 180 espaces de rafraîchissement, tandis que des communautés plus petites comme Huntsville ont transformé hôtels de ville et arénas en centres de soulagement.
Lors de ma visite à un centre de rafraîchissement à Hamilton hier, j’ai rencontré Gladys Thompson, 84 ans, qui vit seule dans un appartement sans climatisation. « Mon immeuble devient si chaud que j’ai du mal à respirer, » m’a-t-elle confié en s’éventant dans la bibliothèque climatisée. « Je viens ici pendant la journée, mais je m’inquiète pour les nuits. »
Les préoccupations de Mme Thompson mettent en évidence un problème crucial: les températures nocturnes pendant les vagues de chaleur restent souvent dangereusement élevées, empêchant le corps de récupérer du stress thermique diurne. Les recherches de Santé Canada indiquent que des nuits consécutives avec des températures supérieures à 20°C augmentent considérablement le risque de mortalité liée à la chaleur, particulièrement chez les aînés et ceux souffrant de problèmes de santé préexistants.
Le Bureau de santé de Simcoe Muskoka recommande plusieurs stratégies pour rester en sécurité pendant les épisodes de chaleur extrême. Dr. Chen souligne l’importance de l’hydratation: « Buvez beaucoup de liquides frais, surtout de l’eau, avant même de ressentir la soif. La soif n’est pas un bon indicateur de déshydratation. »
D’autres recommandations incluent la planification des activités extérieures pendant les moments plus frais de la journée, le port de vêtements amples et de couleur claire, et des douches ou bains frais. Pour ceux qui n’ont pas de climatisation, passer même quelques heures dans des espaces climatisés comme les centres commerciaux, les bibliothèques ou les centres de rafraîchissement peut réduire considérablement le risque de maladie liée à la chaleur.
Des réseaux de soutien communautaire se sont également mobilisés à travers la province. À Sudbury, le programme « Voisins au frais » jumelle des bénévoles avec des résidents vulnérables pour veiller sur eux pendant la chaleur extrême. Pendant ce temps, à Windsor, qui connaît fréquemment certaines des températures les plus chaudes de l’Ontario, le bureau de santé a distribué des climatiseurs portables aux personnes à haut risque grâce à un projet de cartographie de la vulnérabilité à la chaleur.
« Ces approches communautaires sont essentielles car la vulnérabilité à la chaleur ne concerne pas seulement la température—elle touche aussi l’isolement social, la qualité du logement et l’accès aux ressources, » explique Dr. Jamal Hassan du Bureau des changements climatiques et de la santé de Santé Canada.
Les impacts sur la santé de la chaleur extrême vont au-delà des préoccupations évidentes d’épuisement et de coup de chaleur. Les visites aux services d’urgence pour diverses affections, notamment des problèmes respiratoires et cardiovasculaires, augmentent généralement pendant les vagues de chaleur. Les données du Régime d’assurance-maladie de l’Ontario montrent une augmentation moyenne de 12% des visites aux urgences pendant les épisodes de chaleur extrême au cours des cinq dernières années.
Les climatologues avertissent que ce que nous vivons actuellement pourrait devenir notre nouvelle normalité. L’Atlas climatique du Canada prévoit que d’ici le milieu du siècle, les villes ontariennes pourraient connaître trois à quatre fois plus de jours au-dessus de 30°C par rapport aux moyennes historiques si les émissions mondiales de carbone continuent sur leur trajectoire actuelle.
Alors que les résidents de l’Ontario traversent cette période difficile, les responsables de la santé publique soulignent que vérifier l’état des voisins et des membres de la famille vulnérables est l’une des actions les plus importantes que les gens peuvent entreprendre. Les personnes âgées, celles vivant seules et les personnes souffrant de maladies chroniques sont particulièrement à risque pendant la chaleur extrême.
« Il s’agit fondamentalement de soins communautaires, » réfléchit Koivistoinen. « L’infrastructure et les systèmes sociaux que nous construisons aujourd’hui détermineront notre résilience face au climat changeant de demain. »
Pour l’instant, alors que le dôme de chaleur continue de couvrir une grande partie de l’Ontario, on conseille aux résidents de rester vigilants, de se rafraîchir et de rester en contact avec les personnes les plus vulnérables aux effets de la chaleur.
