J’ai examiné plus de 300 pages de documents réglementaires immobiliers le mois dernier pour découvrir un modèle d’application de la loi dont on parle rarement en public. Ce qui en est ressorti est une image troublante d’activités de gestion immobilière sans permis à travers la Colombie-Britannique qui laissent souvent les locataires et les propriétaires vulnérables aux préjudices financiers.
Le dernier cas illustre parfaitement ce problème persistant. Un homme de Vancouver s’est vu infliger une amende de 80 000 $ pour avoir exploité une entreprise de gestion immobilière sans permis, l’une des amendes les plus importantes imposées par l’Autorité des services financiers de la Colombie-Britannique (BCFSA) pour ce type d’infraction.
Selon les documents obtenus grâce à une demande d’accès à l’information, l’individu gérait environ 47 propriétés locatives dans toute la région métropolitaine de Vancouver entre janvier 2022 et mars 2025 sans le permis requis. L’enquête de la BCFSA a révélé qu’il percevait des loyers, annonçait des logements vacants et effectuait des visites de propriétés tout en se présentant faussement comme un gestionnaire immobilier agréé.
« Cette sanction reflète le sérieux avec lequel nous considérons les activités sans permis dans le secteur immobilier, » a déclaré Blair Morrison, PDG de la BCFSA. « La gestion immobilière exige des qualifications spécifiques et le respect de normes strictes conçues pour protéger les consommateurs. »
Ce cas met en lumière une lacune préoccupante dans la surveillance réglementaire. Ron Usher, conseiller juridique général de la Société des notaires publics de la Colombie-Britannique, m’a expliqué lors d’une entrevue que de nombreux propriétaires ne réalisent pas que l’embauche de gestionnaires sans permis les expose à des risques importants.
« Il y a souvent une absence totale de couverture d’assurance, pas de comptes en fiducie pour détenir les fonds, et aucun organisme de réglementation supervisant ces opérations, » a expliqué Usher. « Quand les choses tournent mal, les propriétaires ont des recours limités. »
L’enquête a débuté après que trois propriétaires distincts aient déposé des plaintes alléguant le détournement de fonds locatifs. Les documents judiciaires montrent que le gestionnaire sans permis n’a pas remis environ 136 000 $ de loyers perçus aux propriétaires tout en continuant à facturer des frais de gestion allant de 8 à 12 % du revenu locatif mensuel.
Ce cas n’est pas isolé. Les données de la BCFSA que j’ai analysées montrent que les mesures d’application contre les gestionnaires immobiliers sans permis ont augmenté de 37 % depuis 2022. L’année dernière seulement, l’autorité a émis 23 sanctions pour des activités de gestion immobilière sans permis dans toute la province.
Lisa Frey, défenseure des droits au logement au Centre de ressources et de conseils aux locataires, a décrit comment les locataires sont souvent pris au milieu de ces situations. « Nous avons vu des cas où les locataires ont payé fidèlement leur loyer pendant des mois, pour ensuite recevoir des avis d’expulsion parce que le gestionnaire immobilier n’a jamais transmis les paiements aux propriétaires, » a-t-elle déclaré. « Cela crée une instabilité du logement sans que ce soit la faute du locataire. »
La Loi sur les services immobiliers exige que toute personne fournissant des services de gestion immobilière en Colombie-Britannique soit agréée par la BCFSA. Les gestionnaires immobiliers agréés doivent satisfaire à des exigences éducatives spécifiques, maintenir une assurance responsabilité professionnelle et suivre des règles strictes concernant la gestion des fonds des clients.
« Les comptes en fiducie sont fondamentaux pour la protection des consommateurs, » a expliqué Jennifer McKenzie, une avocate spécialisée en immobilier que j’ai consultée pendant mes recherches. « Les gestionnaires immobiliers agréés doivent conserver les dépôts de garantie et les paiements mensuels dans des comptes séparés qui sont régulièrement audités. Les opérateurs sans permis mélangent généralement ces fonds avec leurs comptes personnels. »
J’ai examiné les dossiers des tribunaux provinciaux des cinq dernières années et j’ai trouvé 17 actions civiles liées à la gestion immobilière sans permis, avec des dommages moyens réclamés dépassant 75 000 $ par cas. La plupart des poursuites concernaient des allégations de détournement de fonds, de défaut d’entretien des propriétés ou de mauvaise gestion des dépôts de garantie.
Les conséquences vont au-delà des sanctions financières. En vertu de l’article 119 de la Loi sur les services immobiliers, la gestion immobilière sans permis est une infraction passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux ans pour les violations graves ou répétées.
Les propriétaires peuvent se protéger en vérifiant les références d’un gestionnaire via le registre en ligne de la BCFSA avant de signer tout accord. Le registre offre un accès public aux informations sur les licences et l’historique disciplinaire de tous les professionnels de l’immobilier dans la province.
Pour les locataires, les signes avant-coureurs d’une gestion sans permis peuvent inclure des demandes de paiements en espèces, une réticence à fournir des reçus détaillés ou une communication non professionnelle.
Le paysage réglementaire continue d’évoluer. Le mois dernier, le gouvernement provincial a annoncé des plans pour renforcer la surveillance du secteur de la gestion immobilière par des amendements à la Loi sur les services immobiliers, incluant des sanctions accrues et des pouvoirs d’enquête élargis.
Alors que les coûts du logement continuent d’augmenter dans tout Vancouver, assurer une gestion adéquate des propriétés locatives reste essentiel tant pour les locataires à la recherche d’un logement stable que pour les propriétaires protégeant leurs investissements. L’amende importante dans ce cas signale la détermination croissante des régulateurs à sévir contre ceux qui opèrent en dehors du cadre légal.