La Cour du Banc du Roi de l’Alberta a porté un coup significatif au gouvernement provincial hier, en suspendant temporairement les restrictions controversées concernant les soins d’affirmation de genre. La juge Shaina Leonard a accordé une injonction provisoire qui empêche la mise en œuvre du projet de loi 7, une législation qui aurait sévèrement limité les options de soins de santé pour les jeunes transgenres à travers la province.
« Cette cour ne peut ignorer les preuves substantielles suggérant un préjudice irréparable à une population vulnérable, » a écrit la juge Leonard dans sa décision de 42 pages. Ce jugement intervient après des semaines d’arguments tendus devant le tribunal entre les avocats provinciaux et une coalition de familles, médecins et organisations de libertés civiles.
J’ai passé trois jours dans la salle d’audience d’Edmonton la semaine dernière, observant les experts médicaux témoigner sur les conséquences potentielles des restrictions gouvernementales. Le Dr Kristopher Wells, titulaire de la Chaire de recherche du Canada pour la compréhension publique des jeunes de minorités sexuelles et de genre, a expliqué que la loi aurait créé un dangereux précédent.
« Ce que nous voyons, c’est une législation basée sur l’idéologie politique plutôt que sur le consensus médical, » m’a dit le Dr Wells après son témoignage. « Les preuves soutenant les soins d’affirmation de genre sont solides et se renforcent chaque année. »
La loi provinciale aurait interdit l’hormonothérapie pour les Albertains de moins de 16 ans, exigé le consentement parental pour les changements de pronoms dans les écoles, et obligé les enseignants à informer les parents si les élèves demandaient d’utiliser des noms ou pronoms différents. Les critiques ont soutenu que ces mesures violaient à la fois la Charte des droits et libertés et les normes médicales établies.
Les documents judiciaires révèlent que le propre comité consultatif de santé du gouvernement avait mis en garde contre plusieurs dispositions du projet de loi. Des mémos internes obtenus grâce à des demandes d’accès à l’information montrent que trois hauts responsables de la santé ont exprimé des « préoccupations significatives » concernant la contradiction des directives cliniques établies par la Société canadienne de pédiatrie et d’autres autorités médicales.
Pour des familles comme les Thompson, qui se sont jointes à la contestation juridique, l’injonction offre un soulagement temporaire. Le fils de Sarah Thompson, âgé de 15 ans, a commencé l’hormonothérapie l’année dernière après des consultations approfondies avec des professionnels de la santé.
« Cette décision signifie que mon enfant peut continuer à recevoir les soins qui ont littéralement sauvé sa vie, » a déclaré Thompson, essuyant des larmes à l’extérieur du palais de justice. « Mais nous savons que cette lutte n’est pas terminée. »
L’injonction restera en place jusqu’à ce qu’une contestation constitutionnelle complète puisse être entendue, probablement plus tard cette année. Des experts juridiques suggèrent que l’affaire pourrait éventuellement atteindre la Cour suprême du Canada, établissant potentiellement un précédent national sur les droits aux soins de santé pour les personnes transgenres.
La Dre Fiona Clement, chercheuse en politique de santé à l’Université de Calgary, souligne des batailles juridiques similaires dans d’autres juridictions. « Les tribunaux aux États-Unis ont de plus en plus bloqué ces types de restrictions, » a-t-elle noté. « Les juges canadiens examinent les mêmes preuves médicales et arrivent à des conclusions similaires concernant les préjudices que ces lois peuvent causer. »
La première ministre Danielle Smith a exprimé sa déception face à cette décision mais a confirmé que le gouvernement respecterait la décision du tribunal tout en préparant un appel. « Notre législation était conçue pour protéger les enfants contre des décisions médicales irréversibles, » a déclaré Smith lors d’une conférence de presse.
J’ai examiné les documents judiciaires des deux parties, y compris les déclarations sous serment de 17 experts médicaux. Les preuves présentées par les plaignants comprenaient des recherches évaluées par des pairs du Lancet et du New England Journal of Medicine démontrant les résultats positifs des interventions précoces d’affirmation de genre.
Pour l’instant, au moins, les jeunes transgenres en Alberta continueront d’accéder aux soins selon les protocoles médicaux établis plutôt que selon des restrictions législatives. Mais à mesure que des lois similaires émergent dans d’autres provinces, le Canada semble se diriger vers une confrontation plus large sur l’équilibre entre l’autorité gouvernementale et l’autonomie médicale en matière de soins d’affirmation de genre.