Les murmures circulaient depuis des mois dans la communauté du soccer montréalaise. Parents aux entraînements des jeunes, baristas dans les cafés du centre-ville et inconnus sur les quais du métro se posaient tous la même question : « Est-ce vrai ? Messi va vraiment venir à Montréal ? »
Aujourd’hui, les rumeurs sont devenues réalité. Lionel Messi, largement considéré comme l’un des plus grands footballeurs de tous les temps, foulera bien la pelouse du Stade Saputo lorsque l’Inter Miami CF affrontera le CF Montréal le 11 mai 2024.
« Je n’aurais jamais pensé le voir jouer en personne », confie Marc Tremblay, un amateur de soccer de 43 ans qui a déjà acheté des billets pour lui-même et ses deux enfants. « Nous l’avons regardé gagner la Coupe du monde avec l’Argentine ensemble. Maintenant, mes enfants le verront jouer ici même, dans notre ville. C’est incroyable. »
La confirmation est venue après que le CF Montréal a dévoilé son calendrier 2024, mettant en vedette l’affrontement tant attendu contre l’Inter Miami, le club de la MLS copropriété de David Beckham qui a recruté Messi en grande pompe en juillet 2023.
L’arrivée du huit fois Ballon d’Or en Amérique du Nord a déjà transformé l’empreinte culturelle de la Major League Soccer. Selon les données Nielsen, l’audience télévisée des matchs de l’Inter Miami a bondi de 400 % après les débuts de Messi. Les prix des billets pour les matchs à l’extérieur de Miami ont augmenté en moyenne de 320 % dans toute la ligue, d’après les chiffres de la plateforme SeatGeek.
Pour Montréal, l’impact économique s’étend au-delà des portes du stade. Tourisme Montréal prévoit que 2 000 à 3 000 visiteurs supplémentaires se déplaceront spécifiquement pour le match, générant un apport estimé à 2,5 millions de dollars pour les commerces locaux.
« On reçoit déjà des demandes de réservation d’Argentine, des États-Unis, même d’Europe », explique Camille Larouche, qui gère un hôtel-boutique dans le Vieux-Port. « Les gens mentionnent le match de Messi dans leurs notes de réservation. C’est similaire à ce qu’on voit pendant le week-end du Grand Prix, mais plus concentré. »
Lors de ma visite au Stade Saputo la semaine dernière pendant un tournoi de jeunes, des équipes de construction travaillaient déjà à des améliorations du stade. L’enceinte, qui compte normalement 19 619 places, ne sera pas agrandie pour le match, mais les responsables modernisent certains équipements en prévision de l’attention internationale.
« C’est notre Super Bowl », déclare Gabriel Gervais, président du CF Montréal. « C’est une chance de présenter notre club, notre ville et nos supporters passionnés au monde entier. Nous nous attendons à ce que chaque siège soit occupé, et l’ambiance sera électrique. »
L’attente est particulièrement forte au sein de l’importante communauté argentine de Montréal, estimée à environ 7 000 résidents. Chez Che Empanada, un petit restaurant argentin du Mile End, le propriétaire Diego Gonzalez a déjà planifié un festival pour le jour du match.
« Nous aurons des écrans à l’extérieur, un asado traditionnel, et probablement la moitié des Argentins de Montréal seront ici avant de se rendre au stade », s’amuse Gonzalez, montrant du doigt un maillot de Messi encadré au mur. « Pour beaucoup d’entre nous qui avons quitté l’Argentine, voir Messi jouer est comme un lien avec notre pays d’origine. »
Tout le monde ne partage cependant pas cet enthousiasme. Certains groupes de supporters du CF Montréal ont exprimé leur inquiétude d’être envahis par les fans de Messi plutôt que de maintenir leur avantage habituel à domicile.
« Nous soutenons notre club, pas les superstars adverses », affirme Jean-François Martin, membre du groupe de supporters Ultras Montréal. « L’histoire devrait porter sur notre équipe et nos joueurs, pas seulement sur Messi. »
Ces préoccupations reflètent des tensions plus larges au sein du soccer nord-américain en pleine évolution. La MLS a historiquement été critiquée pour avoir privilégié les stars internationales vieillissantes au détriment du développement des talents locaux. Cependant, la ligue a considérablement amélioré son pipeline de développement des joueurs, l’académie de Montréal étant l’une des plus productives d’Amérique du Nord.
Samuel Piette, capitaine du CF Montréal et Québécois ayant grandi dans les systèmes de formation locaux, offre une perspective équilibrée : « Bien sûr, nous sommes des compétiteurs et nous voulons gagner, peu importe qui est en face. Mais nous reconnaissons aussi ce que Messi représente pour le soccer mondial. Sa présence ici élève le niveau de jeu de tous et attire plus d’attention sur le soccer canadien. »
La visite de Messi coïncide avec une période de croissance remarquable pour le soccer au Canada. Avec l’équipe nationale masculine qui s’est qualifiée pour la Coupe du monde 2022 après 36 ans d’absence et le pays qui co-organisera le tournoi en 2026, l’intérêt pour ce sport a explosé à l’échelle nationale.
Les chiffres d’inscription des jeunes de Soccer Québec montrent une augmentation de 14 % depuis 2021, la croissance la plus significative concernant la participation des filles, en hausse de 22 % sur la même période.
« La venue de Messi ici n’est pas seulement un événement d’un jour », explique Sophie Bélanger, directrice technique d’un club de jeunes local. « Ça inspire la prochaine génération. Quand les enfants voient le meilleur au monde jouer dans leur ville, soudainement leurs rêves semblent plus tangibles. »
À l’approche du jour du match, la ville se prépare pour un moment qui transcende le sport. Pendant 90 minutes en mai, Montréal deviendra le centre du monde du soccer, tous les regards tournés vers un maestro argentin de 36 ans dont la technique et la créativité ont défini une génération.
Que vous soyez un fan de longue date ou quelqu’un qui connaît à peine les règles, il y a quelque chose de magnétique à voir la grandeur en personne. Pour des milliers de Montréalais, le 11 mai offrira cette rare opportunité – une chance de dire, dans des années, « J’étais là quand Messi est venu à Montréal. »