L’histoire de la déchéance de l’ancien agent de la GRC Randeep Randhawa s’est conclue hier dans un tribunal de Vancouver, où l’ex-gendarme a reçu une peine de 18 mois avec sursis pour son rôle dans un stratagème d’investissement dans le cannabis qui a fraudé des dizaines de Britanno-Colombiens.
Randhawa, qui a servi 12 ans au sein de la GRC avant de lancer Green Valley Medicinal Cannabis Ltd en 2018, a plaidé coupable à plusieurs infractions à la Loi sur les valeurs mobilières de la Colombie-Britannique, notamment pour avoir fait de fausses déclarations aux investisseurs et vendu des titres sans inscription appropriée.
« M. Randhawa a exploité sa réputation d’ancien policier pour gagner la confiance des investisseurs, » a déclaré la juge Eleanor Morrison lors du prononcé de la peine. « Cela représente une violation particulièrement troublante de la confiance du public.«
Selon les documents judiciaires que j’ai examinés, Randhawa a recueilli environ 3,2 millions de dollars auprès de 65 investisseurs entre 2018 et 2020, promettant des « rendements garantis » de 25 % par an grâce à ce qu’il prétendait être une exploitation de culture de cannabis autorisée. L’enquête de la Commission des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique (BCSC) a révélé que l’entreprise n’a jamais obtenu les licences de Santé Canada requises pour la production légale de cannabis.
Christine Larsen, une enseignante retraitée qui a investi 175 000 $ de son épargne-retraite, s’est adressée au tribunal lors des déclarations sur l’impact sur les victimes. « Il nous a montré de faux documents, des photos d’une installation qui n’était pas la sienne, et a utilisé son passé de policier pour nous convaincre que c’était légitime, » a témoigné Larsen. « J’ai perdu ma sécurité de retraite et je travaille maintenant à temps partiel à 68 ans. »
Le directeur de l’application de la loi de la BCSC, Doug Muir, m’a confié que le cas de Randhawa représente une partie d’une tendance inquiétante. « Nous avons constaté une augmentation significative des fraudes liées aux investissements dans le cannabis depuis la légalisation, » a expliqué Muir. « Les investisseurs doivent vérifier les allégations de licence directement auprès de Santé Canada avant d’engager des fonds dans toute entreprise de cannabis. »
L’avocat de la défense a fait valoir que Randhawa avait initialement des intentions commerciales légitimes mais qu’il est devenu désespéré après avoir fait face à des obstacles réglementaires inattendus. Les documents déposés au tribunal montrent qu’il a détourné au moins 950 000 $ des fonds des investisseurs pour des dépenses personnelles, notamment des baux de véhicules de luxe et un acompte sur une maison de 1,8 million de dollars à White Rock.
La peine conditionnelle comprend une assignation à résidence pour les huit premiers mois, suivie d’un couvre-feu strict. Randhawa est également banni à vie des marchés des valeurs mobilières et condamné à payer 2,1 millions de dollars en restitution — bien que la BCSC reconnaisse que le recouvrement complet des fonds des investisseurs est peu probable.
Trina Fraser, experte en droit canadien du cannabis chez Brazeau Seller Law, a noté que cette affaire met en lumière les lacunes réglementaires. « L’industrie du cannabis existe à l’intersection de réglementations complexes sur les valeurs mobilières et d’exigences tout aussi complexes en matière de licences de cannabis, » a déclaré Fraser. « Cela crée un terrain fertile pour les fausses déclarations aux investisseurs peu familiers avec l’un ou l’autre cadre réglementaire. »
La condamnation intervient dans un contexte de surveillance accrue de la fraude en matière d’investissement en Colombie-Britannique. Un rapport de 2023 du Groupe d’experts sur la lutte contre la criminalité financière a révélé que la Colombie-Britannique est devenue un point chaud pour les arnaques à l’investissement, avec des pertes déclarées dépassant 136 millions de dollars par an — un chiffre que les autorités estiment ne représenter qu’une fraction des pertes réelles en raison de la sous-déclaration.
Pour les victimes comme Martin Cho, un agent immobilier de Surrey qui a perdu 250 000 $, la peine semble inadéquate. « Il ne passera pas un jour en prison réelle, » m’a confié Cho à l’extérieur du palais de justice. « Pendant ce temps, j’ai dû retarder ma retraite et vendre ma résidence secondaire pour couvrir mes dettes. »
Le Centre antifraude du Canada recommande aux investisseurs de vérifier le statut d’inscription de toute personne vendant des valeurs mobilières via l’outil de recherche nationale d’inscription tenu par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières. Santé Canada maintient une base de données distincte des producteurs de cannabis autorisés que les investisseurs potentiels peuvent consulter.
La Couronne avait demandé une peine d’emprisonnement de deux ans, faisant valoir que la position de Randhawa en tant qu’ancien policier justifiait une punition plus sévère. La procureure Elaine Chan a souligné que « son expérience dans l’application de la loi n’était pas accessoire à la fraude — elle en était l’instrument.«
Alors que Randhawa quittait le palais de justice hier, entouré de membres de sa famille, il a refusé de répondre à mes questions sur son intention de faire une restitution volontaire au-delà des exigences du tribunal. Son avocat a simplement déclaré que Randhawa « regrette profondément le préjudice causé aux investisseurs et s’engage à faire amende honorable dans la mesure de ses possibilités. »
Pour les investisseurs canadiens, cette affaire sert de rappel sévère que les qualifications professionnelles — même celles aussi fiables que l’expérience dans les forces de l’ordre — ne garantissent pas la légitimité des investissements dans l’industrie encore jeune du cannabis.