Le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a averti mercredi que toute nouvelle agression israélienne déclencherait des représailles plus puissantes que le barrage de missiles lancé par Téhéran contre Israël plus tôt ce mois-ci. Cette déclaration survient dans un contexte de tensions croissantes qui ont rapproché le Moyen-Orient d’une guerre régionale.
« Si le régime sioniste ou ses partisans manifestent une quelconque agression contre nos intérêts, ils feront face à une réponse plus forte », a déclaré Khamenei lors d’une cérémonie commémorant l’anniversaire de la nomination du prophète Mahomet. Le leader de 85 ans, vêtu de son traditionnel turban noir et de ses robes, est resté ferme devant des milliers de partisans scandant des slogans anti-israéliens et anti-américains.
Je suis la réponse régionale depuis l’attaque aux missiles iranienne du 13 avril, qu’Israël affirme avoir causé des dommages minimes grâce à ses défenses aériennes et à l’aide de nations alliées. Lors de mes récentes conversations avec des analystes de sécurité régionaux à Beyrouth, plusieurs ont exprimé leur inquiétude face à une dangereuse nouvelle phase d’escalade.
« Téhéran a soigneusement calibré sa réponse pour qu’elle soit suffisamment significative pour sauver la face sur le plan intérieur tout en tentant d’éviter de déclencher une guerre totale », a expliqué Dina Esfandiary, conseillère principale pour le Moyen-Orient au International Crisis Group. « Mais le risque d’erreur de calcul reste extraordinairement élevé. »
L’attaque d’avril marque la première frappe militaire directe de l’Iran sur le territoire israélien, lancée en représailles au bombardement israélien du complexe de l’ambassade iranienne à Damas le 1er avril. Cette frappe a tué sept officiers des Gardiens de la révolution iraniens, dont deux commandants supérieurs.
Les responsables israéliens ont maintes fois menacé de répondre à l’attaque iranienne, bien que le moment et l’ampleur restent incertains. Le cabinet de guerre du premier ministre Benjamin Nétanyahou délibère sur diverses options tout en poursuivant les opérations militaires à Gaza et en faisant face à une pression croissante du Hezbollah le long de la frontière nord d’Israël.
Selon les données du Armed Conflict Location & Event Data Project, les échanges transfrontaliers entre Israël et le Hezbollah ont entraîné plus de 370 morts depuis octobre, la plupart des victimes étant du côté libanais. Lors d’une visite à la frontière nord la semaine dernière, j’ai été témoin de villages entiers évacués et de terres agricoles abandonnées, les résidents ayant fui les échanges quotidiens de tirs.
Les États-Unis ont tenté de désamorcer les tensions, le secrétaire d’État Antony Blinken appelant à la retenue lors de ses navettes diplomatiques dans la région. « Nous ne voulons pas voir cette escalade », a déclaré Blinken lors d’une conférence de presse en Jordanie. « Nous nous concentrons sur le contrôle de ce conflit tout en soutenant le droit d’Israël à se défendre. »
Pourtant, l’influence de Washington semble limitée. Un diplomate européen à Téhéran, s’exprimant sous couvert d’anonymat, m’a confié que les responsables iraniens estiment avoir démontré avec succès leurs capacités militaires tout en établissant de nouvelles lignes rouges. « Ils signalent qu’ils ne toléreront pas d’attaques contre le territoire souverain iranien ou des hauts responsables sans conséquence », a déclaré le diplomate.
L’arsenal de missiles de l’Iran représente l’un de ses avantages militaires les plus importants. L’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm estime que Téhéran possède des milliers de missiles balistiques avec des portées entre 300 et 2 000 kilomètres, capables d’atteindre Israël et les bases militaires américaines dans toute la région.
Les facteurs économiques pèsent également lourd dans les calculs de l’Iran. Malgré des sanctions internationales paralysantes, les exportations de pétrole de l’Iran ont rebondi à environ 1,5 million de barils par jour, selon les données de suivi des pétroliers compilées par Bloomberg. Tout affrontement militaire majeur risque de perturber cette source vitale de revenus à un moment où l’économie iranienne est déjà aux prises avec une inflation dépassant 40 %.
« La menace de représailles sert plusieurs objectifs pour le régime », a noté Ali Vaez, directeur du projet Iran au International Crisis Group. « Elle dissuade de futures frappes israéliennes tout en permettant aux dirigeants de projeter une image de force auprès d’un public national de plus en plus frustré par les difficultés économiques. »
Pour les Iraniens ordinaires, la perspective d’une guerre ajoute une couche supplémentaire d’anxiété à la vie quotidienne. Lors d’entretiens téléphoniques avec des résidents de Téhéran, plusieurs ont exprimé leurs inquiétudes d’être pris dans un conflit qu’ils se sentent impuissants à influencer.
« Nous sommes pris entre les sanctions et la menace des bombes », a déclaré Mariam, une enseignante de 34 ans qui a demandé que seul son prénom soit utilisé. « La plupart des gens veulent simplement vivre sans peur constante. »
Pendant ce temps, les organisations humanitaires avertissent qu’une escalade régionale pourrait aggraver des conditions déjà désastreuses. Le Comité international de secours rapporte que plus de 34 000 Palestiniens ont été tués à Gaza depuis octobre, avec des infrastructures critiques détruites et la famine menaçant de larges portions de la population.
L’interaction complexe entre postures militaires, manœuvres diplomatiques et politiques intérieures rend difficile la prédiction des prochains mouvements. Les responsables israéliens maintiennent qu’ils doivent répondre à l’attaque iranienne pour maintenir la dissuasion, tandis que Téhéran insiste sur le fait que ses actions étaient une légitime défense justifiée.
Alors que les tensions persistent, les puissances mondiales ont augmenté leurs déploiements navals dans la région. Les États-Unis maintiennent une présence militaire significative avec le groupe aéronaval USS Abraham Lincoln rejoignant récemment l’USS Theodore Roosevelt en Méditerranée, représentant une démonstration de force substantielle.
Reste à savoir si ces menaces croissantes se traduiront par une action militaire directe. Ce qui est clair, c’est que la région se trouve à un carrefour précaire, avec des millions de civils pris dans la balance des décisions prises dans des capitales à des milliers de kilomètres des lignes de front potentielles.