J’ai garé ma voiture de location dans une rue du quartier Cathédrale de Regina par un frais matin d’automne, observant les membres de l’équipe qui s’affairaient à transporter du matériel dans un charmant café à façade de briques. La vapeur s’échappait des tasses de café que tenaient des personnes équipées de casques d’écoute, leur souffle visible dans l’air matinal. C’est la dernière semaine de tournage pour « Un rendez-vous parfait », et malgré l’heure matinale, l’énergie sur le plateau est palpable.
« Nous voulions présenter Regina comme cette perle méconnue », me confie la réalisatrice Stéphanie Mayer alors que nous entrons dans le café temporairement transformé. « Les villes canadiennes servent souvent de doublures pour des lieux américains au cinéma, mais nous situons fièrement cette histoire ici. »
Cette comédie romantique, mettant en vedette l’actrice Melissa Chen, née à Vancouver, et Daniel Odjick de Toronto, raconte l’histoire d’une développeuse d’applications de rencontres qui se retrouve à vivre le même premier rendez-vous désastreux encore et encore. C’est « Un jour sans fin » qui rencontre la romance moderne, avec une sensibilité typiquement canadienne.
Cette production représente quelque chose de de plus en plus rare : un film canadien qui assume son cadre plutôt que de le dissimuler. Selon un rapport de 2023 de l’Association canadienne des producteurs médiatiques, seulement environ 27 % des longs métrages de langue anglaise tournés au Canada présentent réellement des lieux canadiens tels quels.
« Il y a cette idée fausse que le public américain ne s’identifiera pas aux histoires se déroulant dans des villes canadiennes », explique la productrice Rainna Kim, qui a grandi à Regina avant de bâtir sa carrière à Toronto. « Mais nous constatons que l’authenticité voyage bien de nos jours. »
La décision de tourner à Regina n’était pas seulement une question d’authenticité—c’était aussi pratique. Le crédit d’impôt pour la production cinématographique et télévisuelle de la Saskatchewan, réintroduit en 2018 après avoir été supprimé en 2012, offre un rabais de 45 % sur la main-d’œuvre saskatchewanaise. Le retour du programme a progressivement ravivé l’industrie cinématographique autrefois florissante de la province.
« Quand le crédit d’impôt a été coupé, nous avons perdu une génération de travailleurs du cinéma », explique le régisseur des lieux Trevor Harrison alors que nous visitons le parc Wascana, où plusieurs scènes cruciales ont été tournées. « Les gens ont déménagé à Vancouver ou Toronto. Maintenant, certains reviennent, et nous formons une nouvelle génération. »
Sur le plateau, je remarque le mélange de professionnels chevronnés et de nouveaux venus enthousiastes. Emma Cardinal, 24 ans, récemment diplômée du programme de cinéma de l’Université de Regina, travaille comme assistante de production, faisant souvent des journées de 14 heures.
« Je pensais autrefois devoir quitter la Saskatchewan pour travailler dans le cinéma », dit-elle pendant une courte pause. « Maintenant, je travaille aux côtés de personnes qui ont participé à des productions majeures. Le mentorat qui se passe ici est incroyable. »
La production a employé plus de 120 membres d’équipe locaux et injecté environ 3,2 millions de dollars dans l’économie de Regina pendant ses six semaines de tournage, selon Creative Saskatchewan, l’agence de financement provinciale qui aide à administrer le crédit d’impôt.
Au-delà de l’économie, le film capture quelque chose de plus éphémère : le caractère distinctif de Regina. Le directeur de la photographie Jesse Woo, dont les crédits incluent plusieurs séries primées aux Emmy, a trouvé une inspiration visuelle inattendue dans la ville.
« Il y a cette qualité de lumière ici, surtout en automne », explique-t-il en revoyant des séquences sur un moniteur. « Les vastes ciels, la façon dont le soleil frappe les bâtiments plus anciens du centre-ville—cela nous donne cette palette chaude et romantique qui convient parfaitement à l’histoire. »
La production a utilisé des lieux dans toute la ville—de l’historique Hôtel Saskatchewan aux boutiques branchées le long de la 13e Avenue et aux terrains luxuriants de l’Assemblée législative. Chaque lieu apparaît tel quel, permettant à Regina de devenir un autre personnage du récit.
L’actrice principale Melissa Chen, dont les travaux précédents incluent des rôles dans « Transplant » et « The Good Doctor », s’est trouvée charmée par la ville.
« Il y a quelque chose de si authentique à tourner ici », dit-elle entre les prises. « Quand nous avons tourné des scènes en marchant dans le marché fermier, c’étaient de vrais vendeurs locaux. Ils sont devenus partie intégrante de notre histoire. On ne peut pas fabriquer ce genre d’authenticité. »
Pour Daniel Odjick, dont l’héritage algonquin a influencé son approche de la narration tout au long de sa carrière, la production offrait une chance de dépeindre la romance à travers une perspective typiquement canadienne.
« Nous ne nous contentons pas de copier les formules américaines de comédie romantique », explique-t-il. « Nos personnages naviguent dans des dynamiques culturelles qui semblent fidèles à cet endroit. La famille de mon personnage gère un restaurant spécialisé dans la cuisine fusion—des pierogis ukrainiens avec des ingrédients autochtones. C’est une histoire tellement typique des Prairies. »
Alors que le cinéma canadien lutte souvent pour sa visibilité dans un paysage dominé par les productions américaines, « Un rendez-vous parfait » représente une approche différente : embrasser l’identité régionale plutôt que de l’effacer.
Le film est prévu pour une tournée des festivals à partir du printemps prochain, avec une distribution déjà assurée par une importante plateforme de streaming canadienne. La productrice Kim est optimiste quant à ses perspectives au-delà des frontières canadiennes.
« Regardez ce qui se passe à l’échelle mondiale—des films coréens qui remportent des Oscars, des séries britanniques qui dominent le streaming. Le public a soif d’histoires qui viennent d’un endroit spécifique », dit-elle.
En regardant la dernière scène se terminer et l’équipe éclater en applaudissements, je suis frappé par l’importance de ce qui se déroule. Ce n’est pas seulement une comédie romantique qui termine sa production—c’est une partie d’une renaissance pour l’industrie cinématographique de la Saskatchewan et un témoignage de la valeur des histoires canadiennes racontées dans des cadres canadiens.
Lorsque « Un rendez-vous parfait » sera présenté en première, les spectateurs ne verront pas seulement une histoire d’amour—ils verront Regina comme elle mérite d’être vue : non pas comme un substitut pour un autre endroit, mais comme un lieu avec sa propre magie parfaite.