Le son caractéristique du tintamarre — cette joyeuse tradition de faire du bruit où les Acadiens frappent sur des casseroles, soufflent dans des cornes et secouent tout ce qui fait du bruit — a longtemps été l’âme des célébrations de la Fête nationale de l’Acadie. Mais pour certains Néo-Brunswickois, cette tradition chérie pose d’importants défis.
Cette année, une innovation réfléchie change la donne. L’initiative « Quinzou Tranquille », lancée à Moncton, offre aux personnes neurodivergentes et à celles ayant des sensibilités sensorielles une façon de participer aux festivités culturelles sans vivre des expériences sensorielles accablantes.
« Nous voulons que tout le monde puisse célébrer son patrimoine acadien », explique Marie Arsenault, l’une des organisatrices de l’initiative. « Pour de nombreuses familles, les célébrations traditionnelles n’étaient tout simplement pas accessibles à cause des niveaux de bruit. »
Le programme comprend des zones calmes désignées dans les principaux sites de célébration, des horaires de spectacles adaptés aux besoins sensoriels, et des activités alternatives qui capturent l’esprit de la fierté acadienne sans la surcharge sensorielle.
Le Nouveau-Brunswick compte environ 8 000 résidents sur le spectre de l’autisme, selon les statistiques provinciales de santé. En tenant compte d’autres conditions neurodivergentes et des troubles de traitement sensoriel, le nombre de personnes qui pourraient bénéficier de tels aménagements augmente considérablement.
Pour la famille Cormier de Dieppe, l’initiative signifie que leur fils Lucas, âgé de 12 ans, peut participer pour la première fois. « Nous avons toujours voulu qu’il se connecte à ses racines acadiennes, mais les célébrations régulières étaient trop accablantes », raconte Jacqueline Cormier. « L’an dernier, nous avons essayé, mais nous avons dû partir en quelques minutes. Les activités tranquilles de cette année signifient qu’il peut enfin faire partie de la célébration communautaire. »
Les entreprises locales se sont également jointes à l’effort. Le Café Acadie sur la rue Main a créé un espace adapté aux besoins sensoriels avec un éclairage tamisé, des écouteurs antibruit disponibles pour emprunt, et de la nourriture acadienne traditionnelle servie dans un environnement calme.
Cette initiative populaire reflète un changement plus large dans la façon dont les événements culturels abordent l’accessibilité. Des programmes similaires ont émergé dans d’autres provinces, mais les communautés acadiennes du Nouveau-Brunswick sont à l’avant-garde avec des approches particulièrement innovantes en matière d’inclusion.
Dre Nicole LeBlanc, psychologue du développement à l’Université de Moncton, voit une valeur significative dans ces adaptations. « La connexion culturelle est fondamentale pour le bien-être. Quand nous rendons les célébrations accessibles, nous affirmons que chacun a sa place dans notre histoire culturelle », note-t-elle. « Ce ne sont pas seulement des accommodements, ce sont des invitations à une citoyenneté pleine et entière. »
Le gouvernement provincial a également pris note de l’initiative. Dans une déclaration aux médias locaux, le ministre du Tourisme, du Patrimoine et de la Culture du Nouveau-Brunswick a exprimé son soutien à l’initiative et suggéré qu’elle pourrait devenir un modèle pour d’autres célébrations culturelles à travers la province.
L’initiative ne vise pas à remplacer les célébrations traditionnelles — le bruyant tintamarre défilera toujours dans les villes de la province le 15 août. Elle crée plutôt des opportunités parallèles qui maintiennent l’esprit tout en adaptant l’expérience.
Au parc du Centenaire de Moncton, les organisateurs ont créé un programme qui comprend un « tintamarre doux » avec des instruments silencieux, des séances de conte sur l’histoire acadienne, et des activités artisanales mettant en vedette le rouge, le blanc et le bleu emblématiques du drapeau acadien.
« Nous ne diluons pas la culture », insiste Georges Belliveau, un historien acadien local impliqué dans le projet. « Nous élargissons qui peut en faire l’expérience. Le cœur de l’Acadie n’est pas seulement dans le bruit — il est dans la solidarité, la fierté et la résilience de notre peuple. »
La réponse a surpris même les organisateurs. Ce qui a commencé comme un petit projet pilote s’est développé à mesure que des familles de toute la province ont exprimé leur intérêt à y participer. Certaines voyagent plusieurs heures pour être présentes.
Pour beaucoup, l’initiative représente plus qu’une simple chance de célébrer — c’est une reconnaissance significative de leurs besoins. « Quand on a passé des années à regarder les célébrations de loin, être explicitement inclus semble révolutionnaire », explique Sara Richard, dont la fille adolescente a des défis de traitement sensoriel.
Les organismes communautaires desservant les populations neurodivergentes ont contribué à façonner la programmation. Leur contribution a permis de s’assurer que les accommodements allaient au-delà de la simple réduction du bruit pour inclure des considérations comme la gestion des foules, une signalisation claire, des espaces calmes désignés, et des bénévoles formés qui comprennent comment soutenir les participants qui pourraient se sentir dépassés.
Alors que le Nouveau-Brunswick continue de faire évoluer son approche des célébrations culturelles, le Quinzou Tranquille rappelle que tradition et inclusion ne sont pas des valeurs opposées. Elles peuvent plutôt se renforcer mutuellement lorsque les communautés sont prêtes à innover.
Pour le petit Lucas Cormier et des centaines d’autres, ce 15 août ne sera pas simplement une autre Fête des Acadiens — ce sera leur première vraie chance de ressentir la fierté de leur héritage sans les barrières qui les gardaient autrefois à la maison.
Et cela pourrait être quelque chose dont il vaut la peine de faire du bruit — même si c’est d’une manière plus douce.