Le jeu a changé pour les athlètes universitaires canadiens qui cherchent à construire le meilleur chemin vers la réussite. Dans ce que de nombreux entraîneurs appellent un « changement radical », U Sports – l’organisme directeur du sport universitaire au Canada – a considérablement assoupli ses règlements de transfert, offrant aux étudiants-athlètes une mobilité sans précédent entre les établissements.
Finis les périodes d’attente strictes qui pénalisaient autrefois les athlètes changeant d’établissement. Le changement de règlement, qui prendra effet pour l’année universitaire 2024-25, permet aux joueurs de transférer entre les institutions U Sports sans subir les restrictions obligatoires d’un an qui les maintenaient auparavant sur la touche.
« Cela marque un changement fondamental dans notre approche du développement des étudiants-athlètes, » a déclaré Pierre Arsenault, PDG d’U Sports, lors de l’annonce de la semaine dernière. « Nous croyons que cela crée un système plus centré sur l’athlète tout en maintenant l’intégrité académique qui définit le sport universitaire. »
Pendant des décennies, les athlètes universitaires canadiens faisaient face à une pénalité importante en cas de transfert : ils pouvaient s’entraîner avec leur nouvelle équipe mais ne pouvaient pas compétitionner pendant une année universitaire complète. Les seules exceptions étaient accordées par des processus d’appel compliqués ou lorsque les étudiants terminaient leur baccalauréat et poursuivaient des études supérieures ailleurs.
Ce changement rapproche les universités canadiennes du modèle américain de la NCAA, qui a considérablement libéralisé ses règles de transfert ces dernières années. Cependant, les responsables d’U Sports ont rapidement tenu à souligner le contexte canadien.
« Nous avons étudié attentivement le système américain, mais il ne s’agit pas de copier la NCAA, » a expliqué Clint Hamilton, directeur athlétique basé à Victoria, qui a siégé au comité des règles de transfert. « Il s’agit de s’adapter aux besoins des étudiants-athlètes d’aujourd’hui tout en respectant notre culture sportive canadienne unique. »
À l’Université Carleton, l’entraîneur de basketball masculin Taffe Charles voit à la fois une opportunité et un défi dans ce nouveau cadre. « Le développement des joueurs prend du temps, et maintenant nous pourrions voir plus de mouvements lorsque les athlètes estiment qu’ils ne progressent pas assez vite. Mais en fin de compte, cela donne aux jeunes plus de contrôle sur leur avenir sportif. »
Les règles maintiennent toujours des garde-fous académiques. Les étudiants-athlètes doivent être en bonne situation académique avant de transférer, et les règlements des conférences provinciales peuvent ajouter des exigences supplémentaires. Cette orientation académique maintient une distinction cruciale avec le système américain de plus en plus professionnalisé.
Pour les petits établissements comme l’Université de Brandon au Manitoba, ce changement crée à la fois des risques et des opportunités. « Nous investissons beaucoup dans le développement de joueurs qui pourraient maintenant être plus facilement recrutés par des programmes plus importants, » a noté Lee Carter, entraîneur de volleyball féminin. « Mais cela signifie aussi que nous pouvons attirer des talents à la recherche de plus de temps de jeu qui pourraient être relégués au banc dans des écoles plus grandes. »
Selon une enquête du Comité consultatif des étudiants-athlètes, environ 8 % des athlètes d’U Sports ont envisagé un transfert ces dernières années mais ont été dissuadés par la période d’attente. Ce chiffre suggère que nous pourrions voir environ 800 à 1 000 étudiants-athlètes explorer des options de transfert chaque année à travers les 56 établissements membres du Canada.
Le moment coïncide avec des changements plus larges dans le sport amateur mondial. « Les jeunes d’aujourd’hui s’attendent à plus d’autonomie dans leur parcours professionnel, » a observé la sociologue du sport Dr. Janelle Joseph de l’Université de Toronto. « Qu’il s’agisse du portail de transfert dans la NCAA ou des joueurs professionnels exigeant des options d’échange, les athlètes sont de plus en plus considérés comme des participants actifs dans la construction de leur carrière plutôt que comme des actifs organisationnels. »
La plupart des entraîneurs avec qui j’ai parlé à travers le pays reconnaissent que le changement était inévitable, bien que beaucoup expriment des inquiétudes quant aux perturbations potentielles du recrutement. « Nous allons devoir adapter nos approches, » a déclaré Mark McConkey, entraîneur de football des Regina Rams. « Établir des relations avec nos athlètes devient encore plus important lorsque les barrières au départ sont plus basses. »
Pour les athlètes eux-mêmes, la réaction a été extrêmement positive. Emma Peterson, joueuse de volleyball de troisième année à l’Université Dalhousie et représentante étudiante au conseil d’administration d’U Sports, l’a simplement exprimé : « Cela reconnaît que nos carrières sportives sont courtes et précieuses. Parfois, un changement d’environnement est exactement ce dont un étudiant-athlète a besoin pour s’épanouir tant dans le sport que dans les études. »
Le changement de règle aborde également une question d’équité persistante. Auparavant, seuls les athlètes issus de milieux financièrement stables pouvaient réalistement se permettre de transférer et de renoncer à la compétition pendant un an. « Pour de nombreux étudiants universitaires de première génération ou ceux avec des budgets serrés, perdre une année d’admissibilité compétitive n’était simplement pas une option, » a expliqué Dr. Joseph.
Les effets d’entraînement s’étendront probablement au-delà des athlètes individuels. Le recrutement athlétique pourrait devenir plus continu plutôt que concentré sur les finissants du secondaire. Les approches d’entraînement pourraient évoluer pour mettre l’accent sur la rétention des joueurs. Et les petites écoles pourraient développer des programmes de niche pour attirer des transferts cherchant des opportunités de développement spécifiques.
Pour les parents d’athlètes se dirigeant vers l’université, le nouveau paysage offre plus de flexibilité. « Si l’expérience de ma fille n’est pas ce qu’elle espérait, c’est rassurant de savoir qu’elle a des options sans faire dérailler sa carrière sportive, » a déclaré Raymond Chen, parent de Mississauga, dont la fille joue au soccer à l’Université McMaster.
Alors que les équipes se préparent pour la saison 2024-25, l’impact réel reste à voir. Assisterons-nous à une vague de transferts ou simplement à une augmentation modeste de la mobilité des étudiants-athlètes? La réponse se situe probablement quelque part entre les deux, mais une chose est certaine : la dynamique du pouvoir dans le sport universitaire canadien s’est déplacée de manière significative vers les athlètes eux-mêmes.
Et c’est peut-être exactement comme ça devrait être.
