J’ai reçu la décision de 37 pages du juge sur mon bureau jeudi dernier. En parcourant la décision du juge Tremblay rejetant la tentative du gouvernement de protéger les dossiers de son programme anti-désinformation, j’ai ressenti comme une petite victoire pour la transparence dans un paysage informationnel de plus en plus opaque.
« Lorsque les institutions démocratiques prétendent lutter contre la désinformation tout en refusant de divulguer leurs méthodes, nous sommes confrontés à un paradoxe troublant, » a écrit le juge Tremblay dans ce qui pourrait devenir une décision historique sur la responsabilité gouvernementale à l’ère numérique.
Cette décision arrive à un moment critique. La semaine dernière, j’ai assisté à la cérémonie inaugurale des Prix canadiens de la désinformation journalistique à Ottawa, où des journalistes, des vérificateurs de faits et des chercheurs numériques se sont réunis pour reconnaître ceux qui travaillent à protéger notre écosystème d’information. Le contraste entre célébration et inquiétude était palpable.
« Nous honorons l’excellence tout en observant la détérioration de notre environnement informationnel, » a déclaré Maya Rodriguez, directrice de l’Initiative de citoyenneté numérique et présidente du comité des prix. « Les menaces évoluent plus rapidement que nos défenses. »
Les prix ont reconnu six journalistes et deux organismes de presse pour leur travail exceptionnel exposant des campagnes de désinformation coordonnées affectant les processus démocratiques canadiens. Le lauréat Thomas Chen a passé 11 mois à suivre comment de fausses déclarations sur les procédures électorales dans trois provinces se sont propagées des plateformes marginales au discours grand public.
« Au moment où une fausseté atteint Facebook ou le journal télévisé du soir, elle est déjà trop profondément enracinée pour être complètement éradiquée, » m’a confié Chen. « Nous avons besoin de systèmes de détection plus précoces et d’une meilleure surveillance inter-plateformes. »
Son enquête a révélé des preuves reliant trois opérations d’influence apparemment disparates au même réseau de comptes automatisés. Les conclusions ont depuis été citées dans les audiences parlementaires sur la sécurité électorale.
J’ai parlé avec Amara Singh, qui a reçu une reconnaissance pour son enquête sur l’amplification algorithmique de la mésinformation en santé lors de l’épidémie de rougeole de l’année dernière en Colombie-Britannique. Son équipe a analysé plus de 200 000 publications sur les médias sociaux et identifié des modèles montrant comment les systèmes de recommandation axés sur l’engagement privilégiaient systématiquement les contenus trompeurs par rapport aux conseils d’experts.
« Les plateformes se sont quelque peu améliorées, mais leurs modèles économiques restent fondamentalement en contradiction avec l’intégrité de l’information, » a expliqué Singh. « Quand une fausse affirmation génère plus d’engagement que l’information exacte, les algorithmes continuent de récompenser la fausseté. »
Les contestations juridiques sont devenues un outil de plus en plus courant pour les journalistes couvrant la désinformation. L’Association canadienne des journalistes signale une augmentation de 43 % des appels à la liberté d’information liés aux