Lorsque Mira Jensen est retournée à sa voiture dans un stationnement de Richmond, en Colombie-Britannique, en avril dernier, elle a trouvé une note inattendue sur son pare-brise : « Désolé d’avoir heurté votre voiture—appelez-moi et je couvrirai les dommages. » Elle a effectivement appelé, et la personne qui avait laissé la note a initialement accepté de payer les réparations.
Mais deux semaines plus tard, cette personne a changé d’avis.
Selon les documents que j’ai examinés du Tribunal de résolution des litiges civils de la C.-B., Jensen a réclamé 1 845 $ pour les réparations après que l’autre conducteur a refusé de payer. L’affaire reposait sur une question cruciale : est-ce que laisser une note d’excuses constitue une reconnaissance de responsabilité ? La réponse du tribunal était étonnamment simple—non, ce n’est pas le cas.
« La note prouve que le véhicule de l’intimé a été en contact avec le véhicule de la demandeuse », a écrit le membre du tribunal David Jiang dans sa décision du 30 mai. « Cependant, cela seul n’établit pas la négligence de l’intimé. »
J’ai parlé avec Marie Deschamps, avocate en litige civil, qui m’a expliqué pourquoi cela est important. « Dans le droit de la responsabilité délictuelle canadien, des excuses seules ne constituent pas une preuve de négligence. Il incombe toujours au demandeur de démontrer comment les dommages se sont produits et que l’autre partie n’a pas respecté son obligation de diligence. »
Cette décision s’aligne avec la législation provinciale à travers le Canada. La Loi sur les excuses de la Colombie-Britannique empêche spécifiquement que les excuses soient utilisées comme preuve de faute dans les procédures civiles. « La législation encourage les gens à présenter des excuses sans crainte de conséquences juridiques », m’a expliqué Deschamps.
Pour Jensen, le résultat dépendait des preuves—ou de leur absence. Elle a fourni des photos des dommages à son véhicule mais n’a pas pu démontrer exactement comment cela s’est produit ni prouver que l’autre conducteur avait été négligent. Sans témoins ni images de surveillance, elle n’a pas pu atteindre le seuil juridique pour sa réclamation.
J’ai examiné des cas similaires dans différentes juridictions canadiennes, et ils montrent systématiquement que dire « désolé » n’est pas juridiquement contraignant. L’Association canadienne des automobilistes confirme que cela crée une situation difficile pour les conducteurs qui découvrent des dommages en revenant à leur véhicule stationné.
« Sans preuve directe de la façon dont les dommages se sont produits, il est extrêmement difficile de prouver la responsabilité », explique Daniel Green, analyste en assurance à la CAA. « Beaucoup de conducteurs sont surpris d’apprendre qu’ils devront peut-être utiliser leur propre couverture collision, même lorsque quelqu’un admet avoir heurté leur voiture. »
Cette affaire souligne pourquoi les incidents dans les stationnements sont particulièrement problématiques. Contrairement aux routes, les stationnements manquent souvent de règles de circulation claires. Déterminer la faute devient flou lorsque les deux véhicules sont en mouvement ou lorsqu’un conducteur n’est pas présent.
« Juridiquement parlant, tous les conducteurs ont l’obligation d’exercer une diligence raisonnable dans les stationnements », note Cecilia Wong, chercheuse en sécurité routière à l’Université Simon Fraser. « Mais sans témoins ou caméras, prouver qui a manqué à cette obligation est presque impossible. »
L’affaire révèle également un écart troublant entre responsabilité morale et juridique. Bien que de nombreux Canadiens croient que laisser une note est la bonne chose à faire, la décision du tribunal suggère qu’il y a peu d’incitation juridique à l’honnêteté.
Pour les conducteurs comme Jensen, les options sont limitées. Faire une réclamation d’assurance signifie payer une franchise et potentiellement faire face à des augmentations de prime. Intenter une action en justice nécessite des preuves qui sont souvent indisponibles. Et même lorsque quelqu’un admet avoir causé des dommages, cette admission peut n’avoir aucune valeur juridique.
J’ai contacté plusieurs compagnies d’assurance pour comprendre leurs politiques concernant les incidents de stationnement. Elles ont confirmé que sans preuve claire de faute, les conducteurs doivent généralement utiliser leur propre couverture collision, sous réserve de franchises.
Le Tribunal de résolution des litiges civils de la C.-B. a traité des dizaines de cas similaires ces dernières années. Leur décision constante : une note d’excuses ne crée aucune obligation légale de payer. Ce précédent affecte des milliers de cas de collisions mineures chaque année à travers le Canada.
Cette affaire illustre bien la réalité juridique à laquelle font face les automobilistes canadiens dans les stationnements publics. Une simple note d’excuse peut être moralement louable, mais elle n’offre aucune garantie légale de compensation pour les dommages subis.