La pluie torrentielle de juillet dernier qui a laissé des quartiers de Saskatoon sous les eaux n’était pas qu’un simple orage des prairies. Pour des résidents comme Marion Laberge, dont le sous-sol de la rue Churchill s’est retrouvé avec de l’eau jusqu’aux genoux, c’était un douloureux rappel de la vulnérabilité de la ville.
« Tout a été détruit – les photos de famille, les meubles, les souvenirs de hockey de mon fils, » m’a confié Laberge lors d’une réunion communautaire la semaine dernière. « La ville avait promis des solutions après les inondations de 2017. On attend toujours. »
Cette attente pourrait bientôt prendre fin. L’ambitieuse stratégie d’atténuation des inondations de Saskatoon, élaborée après les inondations dévastatrices de 2017, a atteint une étape cruciale avec plusieurs grands projets qui seront achevés ce printemps.
L’initiative de 54 millions de dollars, qui combine la modernisation des infrastructures avec des systèmes naturels de gestion des eaux, représente l’approche la plus complète de la ville en matière de prévention des inondations depuis des décennies.
« Nous travaillons contre le temps et l’évolution des conditions météorologiques, » a expliqué Angela Gardiner, directrice générale des services publics et de l’environnement de Saskatoon. « Ce qu’on appelait autrefois des tempêtes centenaires se produit maintenant tous les cinq à sept ans. »
L’évaluation de Gardiner correspond aux données d’Environnement Canada qui montrent une augmentation de 12% des précipitations extrêmes dans le bassin de la rivière Saskatchewan au cours de la dernière décennie.
Le quartier Montgomery Place a été le premier à voir des résultats tangibles. Le nouveau système souterrain d’eaux pluviales de 8,3 millions de dollars, conçu pour gérer des volumes d’eau 40% plus importants que l’infrastructure précédente, est maintenant achevé à 85% selon les ingénieurs municipaux.
« Les résidents de Montgomery ont subi trois inondations majeures depuis 2015, » a noté la conseillère du quartier 2, Hilary Gough, lors de notre conversation téléphonique. « Ce projet ne concerne pas seulement l’infrastructure – il s’agit d’offrir aux gens une tranquillité d’esprit pendant nos orages d’été de plus en plus violents. »
Pour Thomas Blackburn, résident de Churchill-Riversdale, cette tranquillité d’esprit ne peut pas arriver assez vite. Sa maison a été inondée deux fois en cinq ans.
« Chaque fois qu’il pleut abondamment, nous surveillons tous les caniveaux, en nous demandant si c’est l’orage qui va encore tout submerger, » a déclaré Blackburn, montrant les traces d’eau encore visibles sur les murs de son sous-sol.
L’élément le plus visible de la stratégie de la ville se trouve au parc W.W. Ashley, où un système de bassin sec de 12 millions de dollars capable de retenir temporairement suffisamment d’eau pluviale pour remplir six piscines olympiques est presque opérationnel. En temps normal, la zone fonctionne comme un espace récréatif – une conception à double usage de plus en plus adoptée dans les municipalités canadiennes.
« L’approche du bassin sec représente une planification intelligente, » a expliqué Dr. Kerry Mazurek, professeure de génie civil à l’Université de la Saskatchewan. « Elle maximise l’espace urbain limité tout en offrant une capacité de débordement cruciale lors d’événements météorologiques extrêmes. »
Moins visibles mais tout aussi importantes sont les améliorations apportées aux neuf stations de pompage de la ville, infrastructures essentielles qui déplacent les eaux usées pendant les inondations. Six stations ont été complètement rénovées avec une capacité de pompage améliorée et des systèmes d’alimentation de secours.
Ces progrès arrivent à point nommé pour les commerçants des zones inondables de Saskatoon. Cheryl Woloschuk, dont la boutique de River Landing a subi 30 000 dollars de dommages non assurés lors des inondations de l’été dernier, reste prudemment optimiste.
« La ville ne cesse de parler de ces projets, mais juillet dernier a prouvé que nous sommes toujours vulnérables, » a déclaré Woloschuk. « J’ai installé mes propres barrières anti-inondation, mais en fin de compte, nous avons besoin que les systèmes de la ville fonctionnent. »
Les documents municipaux montrent que les projets restants devraient être achevés d’ici fin 2025, les quartiers Montgomery et Churchill-Riversdale étant prioritaires en fonction de la fréquence et de la gravité historiques des inondations.
La stratégie comprend également des approches moins traditionnelles. L’initiative « Rues vertes » de Saskatoon a planté plus de 120 jardins pluviaux dans toute la ville, chacun conçu pour absorber et filtrer des milliers de litres d’eau pluviale avant qu’elle n’atteigne les égouts pluviaux.
« Ces systèmes naturels offrent de multiples avantages au-delà de l’atténuation des inondations, » a déclaré Robin Majorki, coordinatrice du développement durable urbain à l’Autorité de la vallée de Meewasin. « Ils filtrent les polluants, soutiennent la biodiversité urbaine et embellissent les quartiers – tout en réduisant la pression sur nos infrastructures vieillissantes. »
Mais des défis demeurent. Des rapports internes de la ville obtenus grâce à des demandes d’accès à l’information révèlent que les infrastructures des quartiers plus anciens comme Nutana et Buena Vista nécessiteront 18 millions de dollars supplémentaires d’améliorations au-delà des allocations budgétaires actuelles.
La stratégie anti-inondation de Saskatoon s’inscrit également dans un contexte provincial plus large. L’Agence de sécurité de l’eau de la Saskatchewan a identifié les inondations urbaines comme une préoccupation croissante dans toute la province, Saskatoon, Regina et Prince Albert ayant tous connu d’importantes inondations depuis 2017.
« Les infrastructures municipales conçues dans les années 1960 et 70 n’étaient tout simplement pas construites pour les conditions météorologiques d’aujourd’hui, » a noté Susan Ross, directrice de la planification des bassins versants de l’agence. « Les villes de toute la Saskatchewan sont en train de rattraper leur retard. »
La province a contribué à hauteur de 14,8 millions de dollars aux efforts d’atténuation des inondations de Saskatoon dans le cadre du Programme d’infrastructure Investir au Canada, le gouvernement fédéral ajoutant 18,3 millions de dollars supplémentaires.
Pour des résidents comme Marion Laberge, l’achèvement de ces projets représente plus que des améliorations d’infrastructure – il s’agit de restaurer la confiance dans une ville qu’ils aiment.
« Nous avons choisi Saskatoon parce que c’était sécuritaire, stable, » a-t-elle dit, en regardant les équipes municipales travailler sur un égout pluvial en face de chez elle. « Quand vous avez été inondé plusieurs fois, vous commencez à tout remettre en question – devrions-nous rester, devrions-nous aller quelque part de moins risqué? »
Alors que la Saskatchewan fait face à des conditions météorologiques de plus en plus imprévisibles, l’approche de Saskatoon pourrait devenir un modèle pour d’autres communautés des prairies. L’intégration de l’ingénierie traditionnelle avec l’infrastructure verte offre un plan pour la résilience aux inondations qui équilibre la protection immédiate avec la durabilité à long terme.
Les responsables municipaux ont programmé des séances d’information communautaires tout au long d’avril et mai pour informer les résidents sur les calendriers des projets et discuter des préparatifs d’urgence pour la saison des tempêtes à venir.
La question qui demeure pour de nombreux résidents de Saskatoon n’est pas de savoir si ces projets aideront – c’est de savoir s’ils seront terminés avant que la prochaine tempête majeure ne mette à nouveau à l’épreuve les défenses de la ville.