Je m’appelle Julien Singh et j’ai remarqué une anxiété croissante chez les parents canadiens : comment aider leurs enfants adultes à naviguer dans un marché immobilier de plus en plus inabordable sans compromettre leurs propres plans de retraite. Ce dilemme suscite des conversations familiales remplies d’amour, d’inquiétude et de calculs financiers.
Quand Marc et Louise (noms fictifs) m’ont contacté la semaine dernière, leur situation faisait écho à ce que j’ai entendu de dizaines de parents à travers le Grand Toronto et Vancouver. Tous deux au début de la soixantaine avec des pensions gouvernementales stables et une maison entièrement payée, ils se demandent s’ils devraient offrir des mises de fonds substantielles à leurs deux enfants, âgés de 29 et 32 ans.
« Nous avons travaillé dur pour assurer notre retraite », m’a confié Marc lors de notre appel vidéo, son expression mêlant fierté et inquiétude. « Mais voir nos enfants lutter pour économiser tout en payant des loyers torontois, c’est comme les regarder nager contre un courant d’arrachement. »
Les chiffres racontent une histoire préoccupante. Selon l’Association canadienne de l’immobilier, le prix moyen national d’une maison a atteint 705 000 $ en février 2023. À Toronto et Vancouver, ce chiffre dépasse facilement le million de dollars, même pour des propriétés modestes. Pendant ce temps, Statistique Canada rapporte que l’inflation a dépassé la croissance des salaires pendant une grande partie des deux dernières années, compliquant davantage les efforts d’épargne des premiers acheteurs.
La planificatrice financière Sophie Lemieux voit régulièrement ce scénario dans sa pratique. « L’écart de richesse entre les générations n’a jamais été aussi grand« , explique-t-elle. « De nombreux baby-boomers et parents de la génération X ont bâti leur patrimoine grâce à l’appréciation immobilière que leurs enfants ne peuvent tout simplement pas reproduire dans les conditions actuelles. »
Pour les parents qui envisagent des dons financiers à leurs enfants adultes, le calcul implique plus que les liquidités disponibles. Il nécessite une réflexion approfondie sur leur propre sécurité financière, les implications fiscales, la dynamique familiale et l’impact potentiel sur l’indépendance financière de leurs enfants.
Marc et Louise disposent d’environ 980 000 $ dans des comptes enregistrés (REER et CELI), 350 000 $ supplémentaires en placements non enregistrés, et aucune dette. Leur revenu de pension combiné fournit environ 95 000 $ par an, ce qui couvre confortablement leurs besoins. Ils envisagent d’offrir 100 000 $ à chaque enfant.
Au Canada, il n’y a pas d’impôt sur les dons, ce qui simplifie les mécanismes de transfert d’argent aux enfants adultes. Cependant, les parents devraient considérer ces facteurs clés :
Premièrement, les dons devraient être documentés. Bien que ce ne soit pas légalement requis, une simple lettre confirmant que l’argent est un don plutôt qu’un prêt peut prévenir les malentendus et les complications fiscales ultérieures.
Deuxièmement, les parents devraient clarifier leurs attentes concernant le don. Est-il strictement destiné au logement? Y a-t-il des conditions? Des conversations transparentes sur les intentions peuvent prévenir les tensions familiales.
Troisièmement, considérez le moment. L’Incitatif à l’achat d’une première propriété du gouvernement fédéral et divers programmes provinciaux peuvent interagir avec les dons parentaux de manières qui affectent les critères d’admissibilité.
Quatrièmement, réfléchissez à l’équité familiale. Si un enfant a besoin de plus d’aide financière qu’un autre, comment cela sera-t-il abordé dans la planification successorale pour maintenir l’équité?
Certains parents choisissent des approches alternatives aux dons directs, notamment :
Agir comme co-signataire d’un prêt hypothécaire, ce qui peut aider les enfants à obtenir de meilleurs taux sans transférer immédiatement de l’argent.
Fournir un prêt familial sans intérêt, correctement documenté, qui peut être pardonné avec le temps ou par planification successorale.
Créer une fiducie avec des conditions spécifiques concernant l’achat d’une maison.
Contribuer à un Compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP), lancé en avril 2023, permettant aux premiers acheteurs d’économiser jusqu’à 40 000 $ sans impôt.
Après avoir consulté un planificateur financier, Marc et Louise ont opté pour une approche modifiée. Plutôt que de donner 100 000 $ directement à chaque enfant, ils ont fourni 50 000 $ comme don immédiat plus un prêt sans intérêt de 50 000 $ à pardonner dans cinq ans ou par leur succession, selon la première éventualité.
« Nous avons trouvé un équilibre qui aide nos enfants maintenant tout en préservant une certaine flexibilité financière pour nous », a expliqué Louise. « L’approche structurée nous a également donné la tranquillité d’esprit que nous traitons nos deux enfants équitablement. »
La récente pause des taux d’intérêt de la Banque du Canada pourrait éventuellement apporter un certain soulagement au marché immobilier, mais le transfert de richesse intergénérationnel par le biais de l’aide au logement semble devenir une caractéristique permanente de la planification financière canadienne.
Dans le marché immobilier difficile du Canada, le soutien familial est devenu un chemin de plus en plus commun vers la propriété. Avec une planification minutieuse, une communication transparente et des conseils professionnels appropriés, les parents peuvent aider leurs enfants à bâtir un patrimoine sans compromettre leur propre sécurité de retraite.
Après tout, comme un parent me l’a récemment dit, « On ne peut pas l’emporter avec nous, mais nous avons besoin d’assez pour nous y rendre confortablement d’abord.«