La mer était trompeusement calme mardi dernier lorsque le MV Zaytouna-Oliva approchait des eaux territoriales de Gaza. À bord, 13 militants internationaux, dont deux Canadiens, pensaient effectuer la dernière étape de leur mission maritime contestée pour livrer des fournitures humanitaires à Gaza. En quelques heures, ils se retrouveraient dans des centres de détention israéliens, déclenchant une confrontation diplomatique qui continue de se développer.
« Nous savions qu’il y avait des risques, mais les eaux internationales devraient signifier que le droit international s’applique, » explique Emma Russell, 34 ans, de Vancouver, s’exprimant par téléphone après sa libération hier. Russell et son compatriote canadien David Kronstein, 41 ans, de Montréal, faisaient partie des personnes détenues lorsque des navires militaires israéliens ont intercepté leur petite flottille d’aide à environ 35 milles nautiques des côtes de Gaza.
L’armée israélienne affirme que le navire a violé un blocus naval légal établi en 2007. « La flottille a été interceptée conformément au droit international après de multiples avertissements, » a déclaré le lieutenant-colonel Nadav Shoshani, porte-parole des Forces de défense israéliennes, dans un communiqué. « Le navire et les participants ont été escortés au port d’Ashdod pour y être traités. »
Affaires mondiales Canada a confirmé la détention puis la libération des deux citoyens canadiens. « Les agents consulaires ont été en contact avec les personnes détenues et leurs familles pour leur fournir de l’assistance, » a indiqué Jason Kung, porte-parole d’Affaires mondiales Canada. « Nous continuons à surveiller la situation de près tout en respectant la vie privée des personnes concernées. »
Il s’agit de la septième tentative de la « Coalition de la Flottille de la Liberté » internationale pour briser le blocus naval depuis 2010, lorsqu’une tentative similaire avait entraîné la mort de dix militants lors d’une confrontation avec les forces israéliennes à bord du MV Mavi Marmara. Aucune victime n’a été signalée lors de l’interception de cette semaine.
La détention survient dans un contexte de détérioration des conditions humanitaires à Gaza. Selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), environ 80% des 2,1 millions d’habitants de Gaza dépendent de l’aide humanitaire. Ces derniers mois, les restrictions se sont resserrées sur l’acheminement de nourriture, de médicaments et de matériaux de construction par les postes-frontières terrestres établis.
« Quand les voies officielles échouent, la société civile prend des risques, » explique Dr. Mona El-Farra, directrice de l’Alliance pour les enfants du Moyen-Orient à Gaza. « Ces flottilles sont symboliques, mais elles mettent en lumière la crise permanente à laquelle les Gazaouis ordinaires font face quotidiennement pour accéder aux nécessités de base. »
Les autorités israéliennes maintiennent que le blocus naval est essentiel à la sécurité, citant des inquiétudes concernant la contrebande d’armes vers le Hamas, qui gouverne la bande de Gaza et est désigné comme organisation terroriste par le Canada, les États-Unis et l’Union européenne. « Chaque navire approchant les eaux de Gaza subit un contrôle de sécurité approfondi, » a déclaré Yoav Mordechai, ancien chef du COGAT, l’organisme de défense israélien responsable des affaires civiles dans les territoires palestiniens.
Les critiques du blocus, dont Human Rights Watch et Amnistie Internationale, soutiennent qu’il constitue une punition collective de la population civile de Gaza, violant potentiellement le droit humanitaire international. Le Comité international de la Croix-Rouge a qualifié le blocus de « crise de la dignité humaine. »
Pour les militants canadiens, l’expérience a été éprouvante. « Nous avons été traités rudement lors de l’embarquement initial, » affirme Russell. « Nos effets personnels ont été confisqués et nous avons eu un accès limité à des conseils juridiques pendant les interrogatoires. » Kronstein rapporte avoir été détenu dans une cellule pendant 48 heures avant que les responsables consulaires n’obtiennent l’accès.
Le gouvernement canadien a marché sur une corde raide diplomatique, ne condamnant pas explicitement les actions d’Israël ni n’approuvant les méthodes des militants. « Le Canada soutient le droit de manifestation pacifique mais encourage les citoyens à respecter les avis de voyage et les lois locales lorsqu’ils sont à l’étranger, » a déclaré Kung.
Emmanuel Nachshon, porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, a défendu les détentions: « Les participants savaient qu’ils tentaient de violer un blocus légal. C’était un acte provocateur, pas une livraison d’aide humanitaire. » Les autorités israéliennes notent que l’aide humanitaire approuvée continue d’entrer à Gaza par les passages de Kerem Shalom et de Rafah, bien qu’à des niveaux réduits que les organisations d’aide décrivent comme insuffisants.
L’incident a relancé le débat sur l’isolement de Gaza et les méthodes de protestation appropriées. Dr. Michael Lynk, ancien Rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’homme dans les territoires palestiniens, suggère: « Ces flottilles réussissent, qu’elles atteignent Gaza ou non. Elles attirent l’attention internationale sur le blocus lui-même. »
Après leur libération, les militants canadiens ont été expulsés et interdits d’entrée en Israël pendant dix ans. Leur navire et sa cargaison restent sous la garde israélienne. « Les fournitures—principalement des équipements médicaux et des panneaux solaires—n’étaient pas l’essentiel, » a réfléchi Kronstein lors d’une conférence de presse à Athènes hier. « L’objectif était de contester un système qui maintient deux millions de personnes effectivement emprisonnées. »
Alors que les militants rentrent chez eux, Affaires mondiales Canada déconseille aux Canadiens de participer à de futures flottilles, notant la capacité limitée du gouvernement à fournir une assistance consulaire dans de tels scénarios. Pendant ce temps, les conditions humanitaires à Gaza continuent de se détériorer, le Programme alimentaire mondial rapportant que l’insécurité alimentaire touche désormais 68% des ménages.
Les vagues se sont calmées autour des côtes de Gaza pour l’instant, mais les remous politiques de cette dernière tentative de flottille continuent de se propager par les canaux diplomatiques d’Ottawa à Jérusalem.