Malgré les tensions commerciales actuelles entre le Canada et les États-Unis, le détaillant de vêtements canadien Aritzia continue de séduire les consommateurs américains. L’entreprise vancouvéroise a enregistré une augmentation de 13 % de ses ventes aux États-Unis pour son deuxième trimestre se terminant le 1er septembre 2024, démontrant une résilience remarquable dans un marché crucial pour sa stratégie d’expansion.
« Nous observons une force continue dans nos activités américaines malgré le climat économique et politique plus large, » a déclaré Jennifer Wong, PDG d’Aritzia, lors de la conférence téléphonique sur les résultats de l’entreprise. Cette croissance survient à un moment où les exportations canadiennes font l’objet d’un examen accru au milieu de discussions renouvelées sur les tarifs et les accords commerciaux entre les deux pays.
Le chiffre d’affaires global du détaillant a atteint 534 millions de dollars pour le trimestre, soit une hausse de 6,2 % par rapport à la même période l’an dernier. Ce qui rend cette performance particulièrement remarquable, c’est qu’elle s’est produite dans un contexte de dépenses de consommation prudentes en Amérique du Nord et de frictions diplomatiques croissantes.
Les analystes du commerce de détail soulignent que l’identité de marque soigneusement cultivée d’Aritzia est un facteur clé de son succès continu aux États-Unis. L’entreprise a ouvert stratégiquement des magasins phares dans des centres urbains à fort trafic tout en développant ses capacités de commerce électronique. Cette double approche a aidé à isoler la marque d’une partie de la volatilité qui affecte d’autres détaillants qui dépendent fortement soit des ventes physiques, soit des ventes en ligne exclusivement.
« Aritzia s’est positionnée comme offrant un luxe accessible – un positionnement qui résonne particulièrement bien auprès des consommateurs américains millénariaux et de la génération Z, » explique Tamara Szames, analyste de l’industrie du commerce de détail chez NPD Group Canada. « Leur gamme de prix se situe juste en dessous des marques de créateurs haut de gamme mais bien au-dessus de la mode éphémère, créant une proposition de valeur qui s’avère étonnamment résiliente même lorsque les consommateurs deviennent plus sélectifs avec leurs dépenses discrétionnaires. »
L’expansion américaine de l’entreprise se poursuit sans relâche avec quatre nouvelles ouvertures de magasins prévues avant la fin de l’exercice financier. Ces ajouts porteront l’empreinte américaine d’Aritzia à 52 emplacements, marquant un doublement de sa présence américaine depuis 2019.
Ce qui est particulièrement intéressant dans la croissance d’Aritzia, c’est comment elle contraste avec les expériences de certains autres détaillants canadiens qui ont tenté une expansion aux États-Unis. L’histoire du commerce de détail regorge d’exemples de marques canadiennes qui n’ont pas réussi à s’imposer au sud du 49e parallèle, de l’expérience désastreuse de Target au Canada aux détaillants canadiens comme Roots qui peinent à gagner du terrain sur les marchés américains.
L’environnement économique actuel ajoute une autre couche de complexité. L’inflation s’est refroidie mais reste élevée dans les deux pays, les taux d’intérêt continuent de peser sur les budgets des ménages, et la rhétorique politique autour du commerce s’est intensifiée à l’approche de la saison électorale. Les récentes baisses de taux de la Banque du Canada n’ont pas été totalement suivies par la Réserve fédérale, créant des environnements de consommation divergents sur les deux marchés.
Diane Brisebois, présidente du Conseil canadien du commerce de détail, note que « les succès transfrontaliers comme celui d’Aritzia démontrent que la force d’une marque peut parfois transcender les vents contraires macroéconomiques et politiques. » Cependant, elle prévient que « les détaillants ayant d’importantes activités transfrontalières surveillent attentivement les discussions commerciales, car les modifications aux accords existants pourraient avoir un impact sur tout, des chaînes d’approvisionnement aux stratégies de prix. »
La chaîne d’approvisionnement d’Aritzia semble être un avantage concurrentiel dans cet environnement. Contrairement à de nombreux détaillants de vêtements fortement dépendants de régions d’approvisionnement uniques, l’entreprise a diversifié ses partenariats de fabrication dans plusieurs pays. Cette approche offre une flexibilité pour naviguer dans les changements tarifaires potentiels ou les perturbations d’approvisionnement.
La stratégie numérique de l’entreprise mérite également l’attention. Les ventes en ligne ont augmenté de 17 % d’une année sur l’autre, dépassant la croissance globale et indiquant le fort engagement en ligne de la marque. Cette force numérique constitue un tampon contre les perturbations potentielles des achats transfrontaliers qui pourraient résulter de tout changement de politique commerciale.
Du point de vue financier, Aritzia a maintenu des marges brutes de 43,5 %, faisant preuve de discipline dans une industrie où les rabais sont devenus de plus en plus courants. L’entreprise a déclaré un BAIIA ajusté de 63,2 millions de dollars, ce qui représente une amélioration modeste par rapport à l’année précédente.
Pour l’avenir, Wong a exprimé un optimisme prudent concernant la cruciale saison des achats des Fêtes, notant que « bien que nous soyons conscients des pressions économiques auxquelles les consommateurs sont confrontés, notre assortiment de produits et notre positionnement de marque continuent de résonner. » L’entreprise a maintenu ses prévisions pour l’ensemble de l’année, projetant une croissance du chiffre d’affaires entre 8 et 10 % pour l’exercice 2025.
Pour les investisseurs, l’action d’Aritzia a réagi positivement à ces résultats, grimpant de près de 6 % après l’annonce des résultats. Cela contraste avec le secteur plus large du commerce de détail, qui a connu une volatilité significative ces derniers mois alors que les habitudes de dépenses des consommateurs restent imprévisibles.
Alors que les discussions commerciales entre le Canada et les États-Unis continuent d’évoluer, l’expérience d’Aritzia offre une étude de cas intéressante sur la façon dont les marques établies avec des propositions de valeur claires peuvent naviguer dans des environnements géopolitiques et économiques complexes. Les trimestres à venir testeront si cette résilience se maintient alors que les deux pays naviguent dans des relations commerciales et des conditions économiques changeantes.
Ce qui reste clair, c’est que pour l’instant, les acheteurs américains continuent de voter avec leur portefeuille pour le mélange de style, de qualité et d’abordabilité relative d’Aritzia – une tendance qui semble ininterrompue par le bruit politique entourant les relations commerciales.