Dans les couloirs tranquilles du complexe Science Nord de Sudbury mardi dernier au matin, j’ai observé Melissa Thompson, une mère de deux enfants âgée de 42 ans, qui retroussait sa manche pour une prise de tension artérielle. La technicienne de santé de Statistique Canada bavardait avec elle au sujet du printemps inhabituellement chaud tout en enroulant le brassard autour de son bras. Ce n’était pas un simple rendez-vous médical, mais une collecte de données qui façonnera notre compréhension de la santé canadienne pour les années à venir.
« Je n’ai jamais participé à quelque chose comme ça auparavant, » m’a confié Thompson après sa séance, qui comprenait des mesures physiques et des questions détaillées sur ses habitudes de vie. « Mais quand ils m’ont appelée, je me suis dit – pourquoi pas? Si ça aide les chercheurs à comprendre ce qui se passe dans les communautés nordiques comme la nôtre, c’est important. »
Thompson fait partie des centaines de résidents de Sudbury qui participent à l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé (ECMS), un important effort national de collecte de données sur la santé qui est arrivé dans la ville ce mois-ci et se poursuivra jusqu’en juillet. Cette étude complète combine questionnaires, mesures physiques et échantillons biologiques pour créer ce que Statistique Canada appelle « le portrait le plus complet de la santé des Canadiens. »
Il s’agit du septième cycle de l’enquête depuis sa création en 2007, mais c’est particulièrement significatif pour Sudbury. Les communautés nordiques ont historiquement été sous-représentées dans la recherche nationale sur la santé, créant des angles morts dans notre compréhension des disparités régionales en matière de santé.
« Disposer d’informations de qualité sur la santé des Canadiens vivant dans différentes régions est crucial pour développer des programmes de santé ciblés, » a expliqué Dr Veronica Carson, chercheuse principale du programme ECMS, lors de l’événement de lancement à Sudbury. « Les données que nous recueillons ici aident à identifier les problèmes de santé émergents spécifiques au Nord de l’Ontario qui pourraient autrement passer inaperçus. »
La clinique d’examen mobile — essentiellement un laboratoire médical construit à l’intérieur de remorques — a transformé une partie du stationnement de Science Nord en station de recherche temporaire. À l’intérieur, des techniciens de la santé recueillent des informations allant des lectures de tension artérielle et des mesures de composition corporelle aux échantillons de sang et d’urine qui seront testés pour les contaminants environnementaux, les marqueurs nutritionnels et les indicateurs de maladies infectieuses.
Statistique Canada a sélectionné environ 500 résidents de Sudbury par échantillonnage aléatoire pour garantir que les données représentent fidèlement la communauté. Les personnes choisies reçoivent une lettre initiale, suivie d’une visite en personne d’un représentant de Statistique Canada qui explique le processus et planifie leur rendez-vous à la clinique mobile.
Le moment ne pourrait être plus crucial. La pandémie de COVID-19 a créé d’énormes perturbations dans les soins de santé de routine, tout en élevant simultanément la sensibilisation du public aux données de santé. Selon l’Agence de la santé publique du Canada, les Canadiens de tous les groupes d’âge ont signalé une détérioration de leur santé mentale pendant la pandémie, avec des impacts particulièrement graves dans les communautés rurales et nordiques où les ressources de soins de santé étaient déjà limitées.
« Nous sommes particulièrement intéressés à saisir les indicateurs de santé post-pandémique, » a noté Carson. « Voyons-nous des taux accrus d’hypertension dus aux soins retardés? La gestion des maladies chroniques a-t-elle souffert? L’ECMS nous donne ces réponses aux niveaux national et régional. »
À la clinique mobile, j’ai observé des participants passant par des stations qui mesuraient tout, de la force de préhension à l’acuité auditive. Les techniciens — dont beaucoup ont été embauchés localement — maintenaient un équilibre minutieux entre précision clinique et connexion humaine, expliquant chaque procédure tout en saisissant les données dans des tablettes sécurisées.
Pour Shannon Peltier, membre de la Première Nation Atikameksheng Anishnawbek qui a participé la semaine dernière, l’enquête représente une opportunité pour que les préoccupations de santé autochtones soient documentées dans les données de santé canadiennes plus larges.
« Nos communautés ont des défis de santé spécifiques qui n’apparaissent souvent pas dans les statistiques générales, » a déclaré Peltier. « Avoir des peuples des Premières Nations représentés dans ce type de recherche est important, surtout concernant des problèmes comme les expositions environnementales qui affectent nos territoires traditionnels. »
L’ECMS a précédemment révélé des informations cruciales sur la santé des Canadiens, y compris des données alarmantes sur les niveaux d’activité physique. Le cycle 2018-2019 a constaté que seulement 16% des adultes respectaient les 150 minutes recommandées d’activité physique d’intensité modérée à vigoureuse par semaine — information qui a directement influencé les campagnes de santé publique et les programmes scolaires.
Les cycles précédents ont également détecté des niveaux préoccupants de plomb et d’autres contaminants environnementaux dans le sang des Canadiens, entraînant des mises à jour des directives de santé publique. Pour les économies basées sur les ressources comme Sudbury, avec son histoire d’exploitation minière et de restauration environnementale, ces mesures de santé environnementale revêtent une importance particulière.
La participation est volontaire mais fortement encouragée, Statistique Canada soulignant les protections de confidentialité en place. Toutes les informations personnelles sont protégées par la Loi sur la statistique, qui empêche la divulgation de données individuelles ou leur utilisation à des fins autres que statistiques.
« Les préoccupations de confidentialité sont compréhensibles, » a reconnu Margaret Chen, superviseure de terrain de Statistique Canada supervisant la collecte à Sudbury. « Mais nous expliquons aux participants que leurs informations personnelles sont complètement protégées par la loi. Ce qui compte, ce sont les données agrégées qui nous aident à comprendre les tendances de santé de la population. »
Les participants reçoivent leurs résultats individuels pour certaines mesures, y compris les niveaux de cholestérol, la tension artérielle et les tests auditifs — informations que certains participants valorisent comme un bilan de santé gratuit.
Lorsque la clinique mobile terminera sa résidence à Sudbury en juillet, elle se déplacera vers une autre communauté canadienne, poursuivant un voyage à travers le pays qui inclura finalement environ 16 localités et près de 7 000 participants d’ici fin 2025.
Les données résultantes seront analysées et publiées par étapes, les premiers résultats étant attendus début 2026. Les résultats précédents de l’ECMS ont été largement utilisés par les chercheurs, les décideurs politiques et les responsables de la santé publique pour identifier les problèmes de santé émergents et évaluer l’efficacité des programmes de santé.
En quittant la clinique mobile, Thompson programmait son rendez-vous de suivi pour recevoir ses résultats de tests. « Ça fait du bien de savoir qu’en prenant quelques heures de ma journée, je contribue à quelque chose qui pourrait aider mes enfants à avoir de meilleurs soins de santé plus tard, » a-t-elle dit. « Ça vaut bien le temps consacré. »
Dans un paysage de soins de santé où les communautés nordiques luttent souvent avec l’accès et la représentation, l’arrivée de l’ECMS à Sudbury représente plus qu’une simple collecte de données — c’est la reconnaissance que les expériences de santé des Canadiens du Nord comptent pour notre compréhension nationale du bien-être.