Je marche sur le sentier boueux derrière Dr. Marla Spencer qui se faufile entre les complexes résidentiels de l’est de Toronto. Cette pédiatre est bénévole tous les mardis depuis un mois, faisant du porte-à-porte dans les quartiers où les taux de vaccination sont historiquement bas. La bruine persistante de ce printemps n’a pas entamé sa détermination.
« Il y a cinq ans, je voyais rarement la rougeole, » me dit-elle en glissant une mèche grise sous sa capuche. « Maintenant, j’ai diagnostiqué trois cas depuis février. Ce ne sont pas que des statistiques—ce sont des enfants qui souffrent inutilement. »
L’épidémie de rougeole en Ontario s’est accélérée à un rythme alarmant, les autorités sanitaires confirmant que le nombre de cas a presque atteint 200—une augmentation spectaculaire par rapport aux 36 cas signalés début mars. Cette vague exerce une pression sans précédent sur un système de santé déjà éprouvé par les maladies saisonnières et les pénuries de personnel.
L’épidémie a commencé discrètement en janvier avec des cas importés de voyages internationaux, mais la propagation communautaire s’est accélérée de façon dramatique dans certaines poches de la province où les taux de vaccination sont tombés en dessous du seuil de 95% nécessaire pour une immunité collective efficace. La Santé publique de Toronto a confirmé qu’environ 70% des cas actuels concernent des personnes non vaccinées, et 20% supplémentaires ont un statut vaccinal incomplet.
À l’Hôpital pour enfants malades de Toronto, le service d’isolement a été agrandi deux fois au cours du mois dernier. Dr. Kevin Ward, spécialiste des maladies infectieuses à l’hôpital, m’explique la gravité de la situation lors de ma visite.
« Nous observons des complications que nous n’avions pas rencontrées depuis des décennies, » dit-il à voix basse alors que nous nous tenons devant la zone d’isolement. « Encéphalite, pneumonie sévère—ce ne sont pas que des éruptions cutanées. C’est une maladie qui peut tuer ou causer des dommages permanents. »
Le ministère de la Santé de l’Ontario a mobilisé des équipes d’intervention d’urgence dans les régions touchées et établi des cliniques de vaccination temporaires dans les centres communautaires et les écoles. À Hamilton, où 27 cas ont été confirmés, les infirmières de santé publique font des heures supplémentaires pour répondre à l’afflux soudain de parents cherchant des rendez-vous de vaccination.
Lors de ma visite à une de ces cliniques la semaine dernière au Centre communautaire Westview, la file s’étendait autour du bâtiment. Miranda Lukowicz attendait avec ses trois enfants, âgés de 2, 5 et 7 ans.
« J’ai continué à repousser, » admet-elle, en faisant rebondir son bambin sur sa hanche. « Puis l’enfant de ma voisine a attrapé la rougeole et s’est retrouvé à l’hôpital. Ça a été