Le poids des attentes repose différemment sur les athlètes qui compétitionnent loin des projecteurs. Pour les para-athlètes canadiens, ce fardeau s’accompagne d’une complexité supplémentaire – représenter leur pays tout en naviguant dans un paysage sportif qui relègue souvent leurs exploits aux notes de bas de page plutôt qu’aux grands titres.
La semaine dernière à Kobe, au Japon, les para-athlètes canadiens n’ont pas simplement participé – ils ont dominé d’une manière qui exige notre attention avant les Paralympiques de Paris cet été.
Nate Riech, déjà détenteur du record mondial du 1500m T38, a défendu son titre mondial avec une performance qui a laissé ses concurrents loin derrière. Le temps de 3:54.82 de l’athlète atteint de paralysie cérébrale n’était pas seulement suffisant pour l’or – il a envoyé un message clair sur l’excellence canadienne en para-athlétisme.
« C’est la confirmation que notre programme fonctionne, » a confié Riech à Radio-Canada Sports après sa victoire. « Mais c’est à Paris que je veux être à mon meilleur absolu. Ceci n’est qu’une étape sur le chemin. »
Pendant ce temps, le Québécois Zachary Gingras a décroché le bronze dans la finale du 400m T38, démontrant la profondeur qui se développe dans le programme canadien de para-athlétisme. Son temps de 51.37 secondes a marqué un record personnel sur la scène des championnats du monde.
Le succès du contingent canadien ne s’est pas limité à la piste. Le lanceur de disque albertain Sawyer Ripley a assuré le bronze avec un lancer personnel de 32.64m dans la classification F51. Pour Ripley, cette médaille représente plus qu’un exploit sportif.
« Quand j’ai commencé à compétitionner, je ne trouvais pas beaucoup de modèles canadiens dans les épreuves de lancer para, » a déclaré Ripley. « J’espère que les jeunes qui nous regardent maintenant peuvent se voir dans ce que nous faisons ici. »
Sport Canada rapporte que la participation aux programmes de para-sport a augmenté de 23% depuis 2019, la visibilité d’événements comme ces championnats du monde jouant un rôle crucial dans cette croissance.
Les championnats du monde ont également souligné l’émergence de Zachary Smeenk, 19 ans, qui a remporté l’argent dans la catégorie de course en fauteuil roulant T54. Sa performance signale un changement de garde dans le para-athlétisme canadien, où de nouveaux talents se présentent pour défier les compétiteurs établis.
« J’apprends encore à gérer la pression de ces moments, » a admis Smeenk. « Mais avoir des vétérans dans l’équipe qui me montrent les ficelles fait toute la différence. »
Peut-être qu’aucune histoire n’illustre mieux la résilience des para-athlètes canadiens que celle d’Amanda Rummery. Après avoir manqué plusieurs compétitions majeures en raison de blessures, la sprinteuse d’Edmonton est revenue pour décrocher le bronze au 400m T46. Son parcours après trois chirurgies distinctes offre un récit qui dépasse le cadre du sport.
« Il y avait des jours où je ne voyais pas la voie à suivre, » a partagé Rummery. « Mais c’est ça, les para-athlètes – nous avons tous surmonté des obstacles auparavant. Un de plus devient simplement une partie du voyage. »
Le Comité paralympique canadien a fixé des objectifs ambitieux pour les Jeux de Paris, visant une place parmi les 12 premiers au tableau des médailles. D’après les résultats de Kobe, cet objectif semble de plus en plus réaliste. Le Canada a terminé les championnats du monde avec 15 médailles au total – 3 d’or, 5 d’argent et 7 de bronze.
Ces résultats surviennent malgré les défis de financement qui continuent de créer des disparités entre les programmes olympiques et paralympiques. Selon les statistiques du Programme d’aide aux athlètes de Sport Canada, les athlètes paralympiques reçoivent environ 18% de l’allocation totale du financement, malgré qu’ils rapportent un pourcentage comparable des médailles internationales du Canada.
« Nous faisons plus avec moins, mais imaginez ce qui pourrait arriver avec un soutien équitable, » a noté Mark Arendz, un médaillé paralympique multiple en ski paranordique qui a assisté aux championnats pour soutenir ses collègues des sports d’été. « Ces performances devraient ouvrir des conversations sur l’investissement dans le para-sport. »
Pour le coureur en fauteuil roulant Austin Smeenk, qui a assuré l’argent au 100m T34, les championnats du monde ont fourni un terrain d’essai crucial pour les modifications d’équipement qu’il utilisera à Paris.
« Le fauteuil est essentiellement une voiture de Formule 1 – de petits ajustements font d’énormes différences, » a expliqué Smeenk. « Cette compétition nous a donné des données réelles que nous n’aurions pas pu obtenir à l’entraînement. »
Les championnats ont également souligné comment le para-sport continue d’évoluer techniquement. Les entraîneurs canadiens ont mis en œuvre de nouveaux protocoles de récupération et des stratégies de course spécifiques aux classifications de chaque athlète – des innovations qui, selon le chef d’équipe paralympique Andrew Haley, se traduiront par des succès à Paris.
« Ce que nous voyons, c’est la professionnalisation du para-sport, » a déclaré Haley. « Nos équipes de soutien intégré comprennent maintenant des spécialistes qui comprennent les besoins uniques des athlètes ayant différents handicaps. »
Alors que l’équipe rentre chez elle avec ses médailles, l’attention se tourne vers la préparation paralympique. À moins de trois mois des Jeux de Paris, les para-athlètes canadiens peaufineront des performances qui montrent déjà un potentiel de médaille dans plusieurs épreuves.
La vraie victoire, cependant, pourrait résider dans la reconnaissance croissante que ces athlètes reçoivent. Selon les données de Radio-Canada Sports, l’audience télévisuelle pour les événements para-sportifs a augmenté de 37% depuis les Paralympiques de Tokyo, ce qui suggère que les Canadiens se connectent de plus en plus à ces histoires captivantes d’excellence athlétique.
Pour les athlètes eux-mêmes, chaque compétition représente une nouvelle occasion de changer les perceptions sur le handicap et le sport. Comme le dit le champion du monde Nate Riech, « Nous ne sommes pas inspirants parce que nous avons des handicaps. Nous sommes inspirants parce que nous sommes des athlètes de classe mondiale qui se trouvent avoir des handicaps. Il y a une grande différence. »
Cette différence devient plus claire avec chaque médaille remportée sur la scène mondiale – et si Kobe est un indicateur, les para-athlètes canadiens auront beaucoup d’occasions de faire valoir leur cause à Paris cet été.