Les marchés ont connu une dégringolade hier alors que les tensions au Moyen-Orient atteignaient de nouveaux sommets. Les investisseurs canadiens et américains ont vu leurs portefeuilles se réduire tandis que les prix du pétrole grimpaient suite aux frappes israéliennes contre des cibles iraniennes. La question immédiate pour de nombreux Canadiens : combien de temps cette volatilité va-t-elle durer, et quelles conséquences pour notre reprise économique?
Sur Bay Street, l’indice composé S&P/TSX a chuté de 213,14 points pour clôturer à 23 678,82, le secteur de l’énergie étant le seul à terminer dans le vert. Le scénario était similaire au sud de la frontière, où les trois principaux indices américains ont clôturé en baisse – le S&P 500 a perdu 0,9 %, le Dow Jones a chuté de 0,7 %, et le Nasdaq composite a reculé de 1,1 %.
« Les marchés détestent l’incertitude plus que tout », explique Robyn Davidson, stratégiste en chef de marché chez Meridian Capital. « Quand les tensions géopolitiques s’enflamment, les investisseurs anticipent immédiatement les pires scénarios, ce qui est exactement ce que nous observons maintenant. »
Les prix du pétrole ont bondi de près de 4 % en raison des craintes de perturbation de l’approvisionnement, le West Texas Intermediate s’établissant à 79,85 $ US le baril. C’est le niveau le plus élevé de cette matière première depuis avril, ce qui constitue une rare bonne nouvelle pour les producteurs canadiens d’énergie comme Suncor et Canadian Natural Resources, dont les actions ont grimpé respectivement de 2,8 % et 3,1 %.
La Banque du Canada fait désormais face à une trajectoire plus complexe. La semaine dernière, le gouverneur Tiff Macklem suggérait que la banque centrale pourrait accélérer son calendrier de réduction des taux si l’inflation continuait de se refroidir. Mais la hausse des prix du pétrole pourrait exercer une pression à la hausse sur l’inflation, retardant potentiellement de nouvelles baisses.
« Le timing ne pourrait être plus délicat », affirme Avery Zhang, économiste principal chez RBC Marchés des Capitaux. « La Banque du Canada observait enfin une amélioration constante de l’inflation, et maintenant ce choc externe introduit de nouvelles variables qu’ils devront considérer avant leur prochaine décision politique. »
Pour les Canadiens ordinaires, la réaction du marché a des conséquences immédiates et potentiellement à long terme. La hausse des prix du pétrole se traduit généralement par une augmentation des coûts à la pompe, ce que de nombreux conducteurs ont déjà remarqué. La moyenne nationale pour l’essence ordinaire a grimpé à 1,67 $ le litre hier, selon les données de GasWizard, contre 1,61 $ il y a seulement une semaine.
Les comptes de retraite ressentent également le contrecoup. La volatilité a particulièrement touché les actions technologiques, avec les actions de Shopify chutant de 3,2 % hier. Le Nasdaq, à forte composante technologique, a maintenant baissé pendant trois séances consécutives, mettant sous pression les portefeuilles orientés vers la croissance.
« Il est important pour les investisseurs de garder une perspective », avertit Priya Malhotra, gestionnaire de portefeuille chez Horizon Investments. « Les événements géopolitiques provoquent généralement des réactions boursières vives mais relativement de courte durée. Le tableau économique fondamental en Amérique du Nord reste relativement solide. »
En effet, Statistique Canada a rapporté hier que les ventes manufacturières ont augmenté de 0,9 % en mai, dépassant les attentes des analystes de 0,7 %. Cela suggère que l’économie canadienne maintient son élan sous-jacent malgré les pressions externes.
Les marchés des devises ont également réagi à la crise, le dollar canadien se renforçant légèrement face à son homologue américain en raison du statut du Canada comme exportateur net de pétrole. Le huard a clôturé à 73,45 cents US, en hausse de 0,3 % par rapport à la veille.
Pour les investisseurs qui se demandent comment se positionner, les tendances historiques pourraient offrir quelques indications. Si l’on examine les conflits précédents au Moyen-Orient, les marchés se rétablissent généralement dans un délai de trois à six mois une fois le choc initial dissipé – à condition que la situation ne dégénère pas en une guerre régionale plus large.
« La variable clé maintenant est de savoir si cela reste un conflit contenu ou se transforme en quelque chose de plus étendu », note Zhang. « Les marchés intègrent une prime de risque, mais pas encore un scénario catastrophe. »
L’or, traditionnellement considéré comme une valeur refuge pendant les troubles géopolitiques, a augmenté de 1,2 % à 2 451 $ US l’once. Le Bitcoin, que certains partisans ont positionné comme « l’or numérique », a en fait chuté de 2,3 %, remettant en question ses références en tant que réserve de valeur fiable pendant les crises.
À l’avenir, les investisseurs devraient surveiller plusieurs indicateurs clés. D’abord, tout signe d’intervention diplomatique ou de désescalade pourrait rapidement inverser les pertes d’hier. Ensuite, les données sur la production et l’expédition de pétrole de la région indiqueront si les chaînes d’approvisionnement sont confrontées à des perturbations réelles ou simplement à des préoccupations spéculatives. Enfin, les communications des banques centrales révéleront comment les décideurs monétaires prévoient de naviguer dans cette nouvelle incertitude.
Alors que les marchés ouvrent aujourd’hui, tous les regards sont tournés vers l’évolution de la situation au cours du week-end et si d’autres puissances mondiales interviennent pour empêcher une escalade supplémentaire. Pour les investisseurs et consommateurs canadiens, les ondes de choc de la géopolitique moyen-orientale continuent de démontrer à quel point notre bien-être économique reste interconnecté avec des événements se déroulant à des milliers de kilomètres.