Je me tenais sur le béton étendu des Studios Pinewood Toronto la semaine dernière, observant les équipes démanteler les décors d’une grande production hollywoodienne. L’ambiance était visiblement tendue. « C’est peut-être le dernier grand tournage américain que nous verrons avant longtemps, » m’a chuchoté un concepteur de production chevronné qui a travaillé sur tout, des films indépendants canadiens aux superproductions Marvel.
L’industrie cinématographique de Toronto, évaluée à plus de 2,2 milliards de dollars par an et employant environ 35 000 personnes, fait face à ce que de nombreux initiés décrivent comme une menace existentielle. La promesse de campagne de l’ancien président Donald Trump d’imposer un tarif de 60 % sur les produits canadiens—incluant explicitement la production cinématographique et télévisuelle—a envoyé des ondes de choc à travers le secteur du divertissement torontois, des mois avant toute mise en œuvre potentielle.
« Nous voyons déjà des productions faire une pause, » explique Monique Grignon, une régisseuse des lieux expérimentée avec trois décennies dans le milieu cinématographique torontois. « Les studios attendent de voir ce qui se passera en novembre avant de s’engager dans des tournages canadiens pour 2025. Cette incertitude à elle seule est dévastatrice. »
L’anxiété qui traverse la communauté cinématographique de Toronto n’est pas simplement spéculative. Les analystes de l’industrie chez FilmOntario estiment qu’environ 70 % de la production cinématographique et télévisuelle de Toronto provient des studios et plateformes américains. Sous la structure tarifaire proposée par Trump, une production de 100 millions de dollars coûterait soudainement 60 millions supplémentaires aux studios américains, simplement pour avoir choisi le sol canadien.
« Aucun dirigeant de studio ne peut justifier ce calcul auprès des actionnaires, » affirme Richard Pattinson, économiste spécialisé dans les industries créatives à l’Université de Toronto. « Même avec notre taux de change favorable et nos incitatifs fiscaux, un tarif de 60 % exclurait effectivement Toronto du marché du jour au lendemain. »
La nature interconnectée de l’économie cinématographique de Toronto signifie que les impacts se répercuteraient au-delà des emplois de production directs. J’ai visité Gord’s Equipment Rentals à Etobicoke, où la propriétaire Marsha Gordon m’a montré un entrepôt d’équipement cinématographique spécialisé inhabituellement inactif. « Nous avons déjà eu trois réservations majeures annulées depuis que Trump a commencé à parler de tarifs, » m’a-t-elle confié. « Il ne s’agit pas seulement d’acteurs et de réalisateurs—ce sont des charpentiers, des traiteurs, des chauffeurs, des ateliers de costumes et des centaines de petites entreprises comme la mienne. »
Les données du Bureau du cinéma de Toronto révèlent que la ville a accueilli 1 676 projets de production en 2023, générant plus de 2,29 milliards de dollars en dépenses directes. L’industrie a