Alors que je m’installe pour une autre journée de reportage politique, une histoire attire mon attention qui illustre parfaitement l’intersection entre les politiques d’entreprise et les droits des consommateurs que tant de Canadiens comprennent trop bien.
Lorsque Shannon Waters de Surrey a ouvert sa facture Telus le mois dernier, ce qu’elle y a découvert l’a laissée stupéfaite – des frais inattendus de 1 620 $ pour dépassement de données sur son forfait Internet résidentiel. La facture, près de dix fois son paiement mensuel habituel, est arrivée sans avertissement ni notification.
« J’étais sous le choc. J’étais absolument sous le choc », a confié Waters à Anne Drewa, journaliste de Consumer Matters. Selon Waters, sa famille n’avait pas modifié ses habitudes d’utilisation d’Internet, rendant cette hausse soudaine complètement inattendue.
L’expérience de Waters met en lumière une tension croissante entre les fournisseurs de télécommunications et les consommateurs canadiens qui dépasse les simples litiges de facturation pour soulever des questions de responsabilité des entreprises et de surveillance réglementaire.
Pour de nombreux Canadiens, des histoires comme celle de Waters sont immédiatement reconnaissables. Un rapport du CRTC de 2023 montre que les plaintes concernant les télécommunications figurent parmi les principaux griefs des consommateurs à l’échelle nationale, les erreurs de facturation représentant environ 32 % de toutes les plaintes liées aux télécommunications.
Lorsque Waters a contacté Telus au sujet des frais, l’entreprise a d’abord maintenu sa position, affirmant que l’utilisation des données était légitime. Ce n’est qu’après l’intervention de Consumer Matters que Telus a mené une enquête plus approfondie, créditant finalement le montant total sur le compte de Waters.
« Nous présentons nos sincères excuses à Mme Waters pour cette expérience », a déclaré un porte-parole de Telus. « Après un examen plus approfondi, nous avons déterminé qu’il s’agissait d’une erreur technique ponctuelle qui a depuis été résolue. »
L’entreprise a expliqué que la plupart des clients reçoivent des notifications lorsqu’ils approchent des limites de données, mais a reconnu que ce système avait échoué dans le cas de Waters – une défaillance qui soulève des questions sur les mécanismes de protection des consommateurs au sein des géants canadiens des télécommunications.
John Lawford, directeur exécutif du Centre pour la défense de l’intérêt public, considère ce cas comme emblématique de problèmes plus larges. « Les Canadiens se sentent souvent impuissants lorsqu’ils contestent des erreurs de facturation des fournisseurs de télécommunications », m’a-t-il expliqué lors d’un entretien téléphonique. « Le fardeau de la preuve incombe généralement aux consommateurs, créant une bataille difficile même lorsque les frais sont clairement erronés. »
Ce déséquilibre de pouvoir devient plus préoccupant compte tenu de la consolidation du marché canadien des télécommunications. Avec seulement trois entreprises – Bell, Rogers et Telus – contrôlant environ 90 % du marché selon Innovation, Sciences et Développement économique Canada, les consommateurs ont des options limitées lorsqu’ils sont insatisfaits du service.
Le député libéral Nathaniel Erskine-Smith, qui a précédemment siégé au Comité de l’industrie examinant les questions de télécommunications, m’a confié : « Ces types de cas démontrent pourquoi nous avons besoin de dispositions plus solides de protection des consommateurs dans la Loi sur les télécommunications. Les consommateurs ne devraient pas avoir besoin de l’intervention des médias pour résoudre des erreurs de facturation évidentes. »
Brian Masse du NPD, critique en matière d’industrie, a appelé à plusieurs reprises à l’adoption d’une charte des droits des consommateurs de télécommunications avec de véritables mécanismes d’application. « Ce qui est arrivé à Mme Waters arrive aux Canadiens tous les jours, mais la plupart ne voient pas leur histoire à la télévision », a noté Masse lors d’une audience de comité l’année dernière.
Pour Waters, la résolution a été un soulagement, mais les semaines de stress et d’incertitude ont laissé des traces. « Je n’aurais pas dû avoir à me battre aussi fort ou impliquer les médias pour corriger une erreur évidente », a-t-elle déclaré.
Son expérience révèle une réalité troublante – que le chemin vers la résolution des litiges de facturation de télécommunications reste inutilement compliqué pour de nombreux Canadiens.
Le CRTC, l’organisme de réglementation des télécommunications du Canada, a établi la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision (CPRST) comme agence indépendante pour traiter de tels litiges. Cependant, de nombreux consommateurs ignorent l’existence de cette ressource ou trouvent le processus intimidant.
Les données du rapport annuel 2022-2023 de la CPRST révèlent qu’elle a reçu plus de 9 000 plaintes liées aux services sans fil et Internet, les problèmes de facturation étant constamment en tête de liste.
« Le processus ne devrait pas être aussi compliqué », affirme Dwayne Winseck, professeur à l’École de journalisme et de communication de l’Université Carleton. « Lorsque les entreprises ont autant de pouvoir sur le marché, la surveillance réglementaire doit être plus proactive plutôt que basée sur les plaintes. »
Les observateurs de l’industrie notent qu’à mesure que les Canadiens deviennent de plus en plus dépendants des services Internet pour le travail, l’éducation et la vie quotidienne, des frais inattendus ou des interruptions de service peuvent avoir des conséquences graves au-delà de la simple contrainte financière.
Pour les Canadiens en région rurale en particulier, où des fournisseurs alternatifs peuvent ne pas exister, contester des frais auprès de leur unique fournisseur de télécommunications crée une anxiété supplémentaire concernant d’éventuelles déconnexions de service.
Les députés conservateurs ont récemment appelé à des solutions basées sur le marché, suggérant qu’une concurrence accrue améliorerait naturellement le service à la clientèle. Cependant, les critiques rétorquent que la géographie du Canada et la distribution de sa population créent des monopoles naturels dans de nombreuses régions.
Alors que le Parlement revient de sa pause estivale, l’abordabilité des télécommunications et la protection des consommateurs restent à l’ordre du jour législatif, bien que l’on ne sache pas si des réformes significatives se concrétiseront.
Pour Shannon Waters, cette expérience a changé sa façon de surveiller ses factures de télécommunications. « Je vérifie constamment ma consommation maintenant », admet-elle. « Je ne devrais pas avoir à vivre avec ce niveau d’anxiété à l’idée d’ouvrir ma facture mensuelle. »
Son histoire sert à la fois d’avertissement et de rappel pour les Canadiens – surveiller attentivement leurs relevés, documenter rapidement les frais inhabituels et comprendre leurs droits en tant que consommateurs dans un marché où l’équilibre des pouvoirs favorise souvent les grandes entreprises au détriment des utilisateurs individuels.
Alors que les services de télécommunications passent du statut de luxe à celui de service essentiel, les politiques régissant la façon dont les entreprises facturent, avertissent et résolvent les litiges avec les clients méritent un examen renouvelé – non seulement de la part des régulateurs, mais aussi de nos élus responsables de s’assurer que les entreprises canadiennes traitent les citoyens équitablement.