Alors que le pâle soleil de mars se reflétait sur la glace du Complexe Sportif et de Glace North Surrey à Surrey, une scène à la fois familière et distinctement inhabituelle se déroulait devant moi. Le crissement rythmique des patins, le claquement creux des bâtons sur les rondelles—ces sons composent la bande sonore hivernale du Canada. Mais les voix qui annonçaient les jeux en arabe, en mandarin et en hindi signalaient quelque chose de nouveau qui émergeait dans notre sport national.
J’assistais à la Série Internationale de Hockey pour Débutants, où des équipes de douze pays traditionnellement peu associés au hockey sur glace—notamment l’Inde, le Liban, la Jamaïque et les Philippines—s’affrontaient lors d’un tournoi qui remettait en question les idées reçues sur l’appartenance à la culture du hockey canadien.
« Quand je suis arrivé au Canada il y a dix ans, je n’aurais jamais imaginé jouer au hockey, » m’a confié Ali Mahmoud entre deux présences sur le banc de l’équipe libanaise. La sueur perlait sur son front tandis qu’il ajustait son casque. « À Beyrouth, je n’avais même jamais vu de glace. Maintenant, mes enfants et moi jouons ensemble chaque fin de semaine. On a vraiment l’impression d’appartenir à ce pays. »
Le tournoi, organisé par Hockey Sans Frontières Canada, vise à élargir la portée culturelle du hockey tout en créant un vivier de nouveaux talents dans un sport qui cherche à se développer au-delà de ses bastions traditionnels. Les données récentes de Statistique Canada montrent que les communautés de nouveaux arrivants représentent les segments de population qui croissent le plus rapidement au Canada, mais la participation au hockey parmi ces groupes reste disproportionnellement faible.
Rajan Singh, capitaine de l’équipe indienne, estime que le problème est multidimensionnel. « Ce n’est pas seulement une question d’accès au temps de glace, qui coûte cher, » a-t-il expliqué, tapotant pensivement sa crosse contre ses patins. « De nombreuses familles immigrantes n’ont pas de connaissance générationnelle du jeu. Ils ne l’ont jamais appris de leurs parents, alors enseigner à leurs propres enfants semble impossible. »
Ce décalage culturel existe parallèlement aux barrières financières. Une étude de 2022 de l’Institut pour la citoyenneté canadienne a révélé que les coûts d’équipement et les frais de ligue peuvent dépasser 3 000 $ par an et par enfant, mettant le hockey organisé hors de portée de nombreuses familles nouvellement arrivées qui privilégient leur établissement économique.
Pourtant, lors de ce tournoi, l’enthousiasme transcendait ces obstacles. L’équipe philippine est arrivée avec une section de supporters bruyants, arborant des chemises barong tagalog traditionnelles modifiées avec des feuilles d’érable et des bâtons de hockey. L’équipe jamaïcaine a apporté des rythmes reggae qui pulsaient dans l’aréna pendant l’échauffement, tandis que l’équipe chinoise a démontré une précision technique remarquable qui a attiré les regards admiratifs des entraîneurs canadiens venus observer l’événement.
« Ce à quoi nous assistons, c’est la mondialisation du sport canadien, » a déclaré Dre Amina Jefferson, sociologue du sport à l’Université de la Colombie-Britannique qui étudie l’intégration culturelle par le sport. « Le hockey évolue d’un marqueur d’identité exclusivement canadien à un vecteur d’échange culturel et d’inclusion. »
L’impact du tournoi va au-delà de la représentation symbolique. Pendant ma journée au complexe, j’ai observé des recruteurs de Hockey Canada prenant des notes sur des joueurs démontrant un talent exceptionnel. Marc Bergevin, ancien directeur général de la LNH travaillant maintenant avec les programmes de développement de Hockey Canada, a expliqué l’importance stratégique de ces événements.
« L’avenir du hockey canadien dépend de l’inclusion de tous les Canadiens, » a affirmé Bergevin, regardant un attaquant particulièrement doué de l’équipe jamaïcaine exécuter un parfait toe-drag autour d’un défenseur. « Des pays comme la Jamaïque ont d’incroyables traditions athlétiques. Imaginez ce qui se passe quand on combine ces capacités athlétiques brutes avec le développement des compétences en hockey. »
Les résultats de cette approche se matérialisent déjà. Les taux de participation au hockey parmi les communautés de nouveaux arrivants ont augmenté de 27% depuis 2018, selon Hockey Canada. Parallèlement, les ligues professionnelles connaissent une plus grande diversité, avec des joueurs comme Jujhar Khaira (Inde), Zachary Aston-Reese (d’origine jamaïcaine/philippine) et Jason Robertson (d’origine philippine) qui inspirent de nouvelles générations.
Pour Saanvi Patel, 14 ans, qui regardait le tournoi avec sa famille, voir l’équipe indienne concourir a été transformateur. « J’ai toujours pensé que le hockey n’était pas pour les gens qui me ressemblent, » a-t-elle dit, suivant attentivement le jeu. « Mais maintenant je demande à mes parents si je peux rejoindre une équipe. »
Le tournoi n’était pas sans défis. Certains matchs ont révélé d’importantes disparités de compétences, et les barrières linguistiques occasionnelles ont compliqué les communications avec les arbitres. J’ai été témoin de moments de frustration lorsque des joueurs peu familiers avec certaines règles faisaient face à des pénalités qu’ils ne comprenaient pas pleinement.
Pourtant, ces moments ont été éclipsés par la camaraderie qui s’est développée tout au long du week-end. Après que l’équipe libanaise ait subi une défaite difficile contre une équipe jamaïcaine plus expérimentée, les joueurs jamaïcains ont invité leurs adversaires à un repas partagé où ils ont échangé maillots et coordonnées.
« C’est ce qui rend le hockey spécial, » m’a confié Caroline Ouellette, directrice du tournoi et quadruple médaillée d’or olympique avec Équipe Canada, alors que nous observions cet échange. « Le jeu crée une communauté au-delà des différences. Ces joueurs resteront connectés longtemps après leur retour chez eux. »
À l’approche des finales du dimanche, les gradins se sont remplis de familles représentant une mosaïque d’expériences canadiennes. Des enfants portaient des maillots affichant des noms de pays inhabituels aux côtés des traditionnels équipements à la feuille d’érable. Le stand de concession avait élargi son offre pour inclure samosas et poulet jerk aux côtés des traditionnels hot-dogs et poutines.
L’équipe des Philippines a finalement remporté le trophée du championnat après une victoire palpitante en prolongation contre la Jamaïque, mais la véritable réussite semblait se produire dans les gradins, où les barrières culturelles se dissolvaient dans des célébrations partagées.
Lorsque j’ai demandé à Ouellette l’avenir du tournoi, elle a fait un geste vers la foule diverse. « C’est déjà un succès au-delà de ce que nous avions imaginé. L’année prochaine, nous prévoyons la participation de vingt pays, et nous discutons également de l’extension aux équipes féminines. »
En quittant l’aréna ce soir-là, j’ai croisé un groupe de jeunes garçons—certains en turbans, d’autres en hijabs, plusieurs en maillots de hockey—jouant une partie improvisée de hockey de rue dans le stationnement. Ils appelaient leurs jeux dans un mélange d’anglais, de punjabi et d’arabe.
À ce moment-là, il était clair que le sport national du Canada est en train de changer, non pas de diminuer. Il s’élargit pour refléter les visages de tous ceux qui appellent maintenant ce pays leur foyer, écrivant un nouveau chapitre dans notre histoire nationale, un lancer-frappé à la fois.