Les propos controversés de la première ministre Danielle Smith concernant un possible référendum ont peut-être provoqué un tollé national, mais les répercussions au sein même de son Parti conservateur uni ont révélé des tensions plus profondes concernant l’expression politique au Canada.
Après avoir suggéré que l’Alberta pourrait potentiellement tenir un référendum sur des questions fédérales comme l’immigration et les politiques de taxe carbone, Smith a immédiatement fait face à une résistance d’Ottawa. Cependant, plusieurs membres de son parti se sont rapidement ralliés derrière son droit de discuter ouvertement de telles options constitutionnelles, même s’ils n’étaient pas d’accord avec les propositions spécifiques.
« La première ministre évoquait des idées lors d’un point de presse. C’est ce que font les leaders – ils réfléchissent à voix haute sur des solutions possibles, » a déclaré Rebecca Schulz, ministre de l’Environnement de l’Alberta, lors d’un événement communautaire à Calgary jeudi dernier. « Nous pouvons débattre du bien-fondé de ces idées, mais suggérer qu’elle ne devrait même pas parler des options constitutionnelles disponibles aux provinces franchit une ligne troublante. »
La controverse a commencé lorsque Smith, répondant à des questions sur les tensions fédérales-provinciales, a mentionné les référendums comme un outil que l’Alberta pourrait envisager pour contester des politiques fédérales qu’elle juge préjudiciables aux intérêts provinciaux. Les critiques l’ont immédiatement accusée d’attiser le sentiment séparatiste, le premier ministre Justin Trudeau qualifiant ces commentaires de « dangereusement divisifs » pendant la période des questions.
Un récent sondage d’Abacus Data suggère qu’environ 42% des Albertains estiment que la province devrait avoir plus d’autonomie constitutionnelle, bien que seulement 19% soutiennent une indépendance totale. Ces chiffres sont restés relativement stables depuis l’élection fédérale de 2019.
Ce qui est frappant dans les suites de cette affaire, ce n’est pas tant les propositions spécifiques de référendum de Smith, mais plutôt comment le débat s’est transformé en une conversation plus large sur l’expression politique. Plusieurs députés du PCC qui, en privé, ne sont pas d’accord avec les tactiques référendaires, ont néanmoins défendu le droit de leur première ministre d’explorer publiquement les options constitutionnelles.
« Il ne s’agit pas de savoir si les référendums sont la bonne approche. Il s’agit de savoir si les élus devraient pouvoir discuter de toute la gamme d’outils démocratiques à leur disposition sans condamnation immédiate, » m’a confié la politologue Melanee Thomas lors d’une entrevue à l’Université de Calgary.
Cette controverse met en lumière la tension croissante entre les juridictions provinciales et fédérales, particulièrement dans les provinces productrices d’énergie. Les données de Statistique Canada montrent que l’Alberta a contribué environ 20 milliards de dollars de plus aux coffres fédéraux qu’elle n’a reçu en dépenses fédérales l’année dernière – une source de frustration continue pour de nombreux Albertains qui estiment que leurs préoccupations économiques sont rejetées par Ottawa.