Le tramway aurait dû être un espace sécuritaire. Mais pour un usager de Toronto le mois dernier, il est devenu le théâtre d’une violation traumatisante qui soulève encore une fois des questions sur la sécurité des passagers dans les transports en commun.
La police de Toronto sollicite l’aide du public pour identifier un suspect recherché en lien avec une agression sexuelle survenue dans un tramway de la TTC près de l’intersection King Street West et Spadina Avenue. L’incident, signalé le 10 avril vers 19h30, implique un passager masculin qui a approché et agressé sexuellement un autre usager avant de quitter les lieux.
J’ai examiné le bulletin policier publié hier, qui comprend des images du suspect décrit comme un homme de 30 à 40 ans, de corpulence moyenne et aux cheveux noirs. Il portait une veste bleue, un jean bleu et des chaussures blanches.
« Les agressions sexuelles dans les transports représentent une catégorie d’infractions particulièrement troublante car elles violent l’attente de sécurité dans les espaces publics partagés, » explique Farrah Khan, gestionnaire de Consent Comes First à l’Université Métropolitaine de Toronto. « Ces incidents se produisent souvent dans des conditions de forte affluence où les agresseurs exploitent la proximité. »
Ce cas s’inscrit dans une tendance inquiétante. Les données de la TTC obtenues grâce à une demande d’accès à l’information montrent que les agressions sexuelles signalées dans les transports torontois ont augmenté de 31% entre 2021 et 2023. Les défenseurs de la sécurité dans les transports réclament depuis longtemps des mesures de sécurité améliorées qui équilibrent surveillance et respect de la vie privée.
« Le défi consiste à créer des systèmes de sécurité qui ne se contentent pas d’ajouter plus de surveillance mais qui préviennent réellement ces incidents, » affirme Emily May, cofondatrice de Hollaback!, une organisation luttant contre le harcèlement dans les espaces publics. « La formation à l’intervention des témoins pour le personnel de la TTC et les campagnes de sensibilisation du public ont montré des résultats prometteurs dans d’autres réseaux de transport. »
Les dossiers judiciaires que j’ai examinés dans des affaires similaires indiquent que les preuves vidéo des véhicules de transport se sont avérées cruciales pour les poursuites. Le réseau de caméras de la TTC, modernisé en 2022, couvre désormais presque tous les véhicules et stations. Mais la surveillance seule n’a pas endigué la vague d’incidents.
Le conseil d’administration de la TTC a approuvé l’an dernier une initiative d’amélioration de la sécurité de 2,4 millions de dollars suite à la pression publique. Le plan comprenait des agents spéciaux supplémentaires et des boutons d’assistance d’urgence, mais la mise en œuvre a été progressive. La commission des transports fait l’objet de critiques de la part des défenseurs de la sécurité qui estiment que la réponse reste insuffisante.
« Nous observons une approche réactive plutôt que préventive, » note Yamikani Msosa, éducatrice anti-violence basée à Toronto. « Lorsque nous avons étudié les réseaux de transport affichant des taux d’agression plus faibles, nous avons constaté qu’ils combinaient des améliorations de conception physique avec des programmes de sécurité communautaires. »
L’unité des crimes sexuels de la police de Toronto mène l’enquête. L’agente-détective Sarah Chen a souligné l’importance de la coopération du public: « Même de petits détails fournis par d’autres passagers pourraient aider à identifier la personne responsable. »
Pour les survivants d’agressions dans les transports, le signalement reste difficile. Le Centre d’aide aux victimes de viol de Toronto a documenté que seulement environ 20% des agressions sexuelles dans les transports sont signalées aux autorités. Les obstacles comprennent la peur de ne pas être cru, la retraumatisation durant les processus d’enquête, et les inquiétudes concernant l’issue des affaires.
« De nombreux survivants que j’ai conseillés décrivent un sentiment d’être piégés pendant les agressions dans les transports—physiquement confinés dans le véhicule et socialement contraints par le silence des témoins, » explique Deb Singh, conseillère et défenseure au Centre d’aide aux victimes de viol de Toronto.
Entre-temps, le suspect court toujours. La police demande à toute personne détenant des informations de les contacter au 416-808-5200 ou de laisser un tuyau anonyme auprès d’Échec au crime.
Alors que cette enquête se poursuit, elle met en lumière la tension permanente entre l’accessibilité des transports et la sécurité des passagers. La TTC transporte environ 1,5 million d’usagers quotidiennement, rendant impossible le contrôle de chaque passager. Pourtant, le public s’attend raisonnablement à être protégé lors de l’utilisation de services essentiels.
Pour l’instant, la police de Toronto poursuit ses recherches, et un autre usager des transports rejoint malheureusement les rangs de ceux pour qui les transports en commun sont devenus le lieu d’un traumatisme plutôt qu’un simple moyen de se déplacer dans la ville.