Le dernier trimestre n’a pas été tendre pour Ford Motor Company. Le constructeur automobile a déclaré une perte stupéfiante de 1,2 milliard de dollars, pointant directement du doigt le lourd tarif douanier de 25 % imposé sur les véhicules fabriqués au Mexique entrant sur le marché canadien. Cette barrière commerciale inattendue, entrée en vigueur fin mai, a contraint l’entreprise à absorber des coûts importants plutôt que de les répercuter entièrement sur les consommateurs dans un marché automobile déjà en ralentissement.
« Nous faisons face à une pression extraordinaire sur plusieurs fronts, » a déclaré John Lawler, directeur financier de Ford, lors de la présentation des résultats. « La situation tarifaire au Canada représente seulement l’un des nombreux vents contraires que nous naviguons dans cet environnement commercial mondial de plus en plus complexe. »
La situation met en lumière la vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement automobiles qui s’étendent à travers l’Amérique du Nord. Ford, comme de nombreux fabricants, a passé des décennies à optimiser son réseau de production sous l’Accord de libre-échange nord-américain et son successeur, l’ACEUM. Les usines mexicaines de l’entreprise produisent plusieurs modèles populaires vendus au Canada, dont le Bronco Sport et la camionnette Maverick.
Le gouvernement canadien a mis en œuvre ces tarifs en réponse aux restrictions mexicaines sur certaines importations agricoles. Ce qui a commencé comme un différend sur les produits laitiers et les pommes de terre s’est transformé en un conflit commercial automobile à part entière, les véhicules devenant des dommages collatéraux dans une partie d’échecs économique plus large.
Les analystes de l’industrie estiment que Ford fait face à des coûts supplémentaires de 65 à 80 millions de dollars par trimestre si la situation tarifaire persiste. « Les constructeurs automobiles fonctionnent déjà avec des marges relativement minces, » explique Miranda Santos, analyste automobile principale chez Hamilton Research Group à Toronto. « Un tarif de 25 % brise fondamentalement le modèle économique sur lequel ces entreprises ont bâti leurs chaînes d’approvisionnement. »
Ford n’est pas seul à ressentir cette pression. General Motors et Stellantis ont également exprimé leur inquiétude quant à l’impact des tarifs sur leurs opérations nord-américaines. L’industrie automobile s’appuie traditionnellement sur le mouvement prévisible des pièces et des véhicules à travers les frontières, les composants traversant souvent plusieurs fois avant qu’un véhicule ne soit achevé.
Pour les consommateurs canadiens, la situation crée de l’incertitude dans un marché déjà difficile. Les prix des nouveaux véhicules ont augmenté d’environ 21 % depuis la pandémie, selon les données de Statistique Canada, dépassant l’inflation