Alors que les Canadiens déployaient leurs drapeaux à la feuille d’érable le week-end dernier, leurs paniers d’achats racontaient une histoire économique fascinante. Malgré les pressions inflationnistes qui continuent de peser sur les budgets des ménages, les consommateurs à travers le pays ont démontré un engagement remarquable envers les entreprises locales pendant les célébrations de la fête du Canada.
Le mouvement « achetez local » n’est pas qu’un simple sentiment patriotique—il devient un modèle économique déterminant avec des implications importantes pour notre paysage commercial national. Selon les données de Square Canada, les transactions des petites entreprises ont bondi de 18% durant la semaine précédant le 1er juillet par rapport aux week-ends ordinaires d’été, avec des performances particulièrement fortes dans les secteurs de l’alimentation artisanale, des boissons artisanales et des vêtements fabriqués localement.
« Nous observons ce que j’appellerais des ‘dépenses basées sur les valeurs’ qui émergent comme une force d’opposition à l’anxiété liée à l’inflation, » explique Corinne Pohlmann, vice-présidente principale à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante. « Les consommateurs font des choix délibérés concernant la destination de leurs dollars, même lorsque ces dollars ne vont pas aussi loin qu’avant. »
Cette tendance semble particulièrement prononcée pendant les fêtes patriotiques, lorsque le lien émotionnel avec les entreprises communautaires se renforce. Au marché Kensington de Toronto, l’affluence a augmenté de près de 30% pendant le week-end férié, de nombreux acheteurs mentionnant spécifiquement « le soutien aux entreprises canadiennes » comme motivation pour braver les foules.
Les mécanismes économiques derrière ce comportement sont plus complexes que le simple patriotisme. Les recherches du Conseil canadien du commerce de détail suggèrent que 67% des consommateurs se renseignent maintenant sur l’origine d’un produit avant de l’acheter, contre 42% dans les enquêtes pré-pandémiques. Cela représente un changement fondamental dans la façon dont les Canadiens abordent la consommation—un changement qui pourrait avoir des conséquences durables tant pour les multinationales que pour les entreprises locales.
Les dépenses locales créent également ce que les économistes appellent « l’effet multiplicateur ». Pour chaque dollar dépensé dans une entreprise locale, environ 63 à 75 cents restent dans l’économie locale, contre environ 43 cents pour les détaillants non locaux. Cette onde économique génère une résilience communautaire que de nombreux consommateurs privilégient désormais parallèlement aux considérations financières personnelles.
« Les gens comprennent de plus en plus que dépenser localement n’est pas de la charité—c’est investir dans son propre écosystème économique, » note Diane Brisebois, présidente du Conseil canadien du commerce de détail. « Cette prise de conscience s’est considérablement accélérée depuis 2020. »
Les données révèlent d’intéressantes variations régionales. Le Canada atlantique a montré la plus forte préférence pour les achats locaux cette fête du Canada, le Nouveau-Brunswick signalant une augmentation de 24% des transactions commerciales locales. Pendant ce temps, l’Alberta et la Saskatchewan ont démontré des augmentations plus modestes mais toujours significatives de 12% et 14% respectivement.
La technologie qui permet ce changement mérite attention. Les systèmes de point de vente qui mettent en évidence les produits fabriqués au Canada, les applications qui cartographient les entreprises locales et les plateformes de paiement numérique qui simplifient les transactions pour les petits vendeurs ont tous contribué à rendre les achats locaux plus pratiques. Square Canada rapporte que les paiements sans contact dans les entreprises locales ont augmenté de 43% d’une année sur l’autre, suggérant que la friction technologique n’est plus un obstacle au choix des options locales.
Derrière ces statistiques se trouvent de vrais propriétaires d’entreprises qui en ressentent l’impact. « Il y a trois ans, la fête du Canada n’était qu’un week-end comme un autre pour nous. Maintenant, c’est encerclé sur notre calendrier comme une opportunité cruciale de revenus, » explique Priya Sharma, qui possède une petite entreprise de produits de bain et de soins corporels à Vancouver. « Nous voyons des clients rechercher spécifiquement des cadeaux fabriqués au Canada et mentionner qu’ils nous choisissent plutôt que les grandes chaînes. »
La tendance s’étend au-delà du commerce de détail vers les services et les expériences. Les réservations pour les visites locales, les cours de cuisine et les ateliers d’artisanat ont connu une augmentation de 32% pendant le week-end férié selon les données de l’Association de l’industrie touristique du Canada. Beaucoup de ces expériences ont explicitement commercialisé leurs connections canadiennes et leur impact économique local.
Ce changement n’est pas passé inaperçu auprès des grandes entreprises, dont beaucoup mettent maintenant en avant leurs fournisseurs canadiens, leurs employés et leurs investissements communautaires. Les grands détaillants, notamment Loblaws et Canadian Tire, ont considérablement élargi leurs sections « fabriqué au Canada » avant le 1er juillet, reconnaissant le pouvoir d’achat du sentiment patriotique.
Cependant, le mouvement « achetez local » fait face à d’importants vents contraires. L’inflation continue d’éroder le pouvoir d’achat, avec des prix alimentaires en hausse de 2,2% d’une année sur l’autre selon les derniers chiffres de Statistique Canada. Cela crée une tension entre les valeurs et la valeur—les consommateurs veulent soutenir les entreprises locales mais doivent étirer leurs dollars plus loin qu’avant.