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J’ai passé mardi dernier à parcourir la dernière série d’amendes du MAPAQ pour les restaurants – pas exactement ce que la plupart des journalistes appelleraient une mission passionnante. Mais pour les Montréalais qui font attention à leurs lieux de restauration, ces rapports d’inspection offrent un aperçu révélateur de ce qui se passe derrière les portes des cuisines de notre ville.
Depuis janvier, l’autorité québécoise de sécurité alimentaire a distribué plus de 6 000 $ d’amendes aux établissements montréalais pour des infractions allant des problèmes de nuisibles au stockage inadéquat des aliments. La plus importante pénalité – 1 600 $ – a été infligée à un restaurant populaire du centre-ville après que les inspecteurs ont découvert de la viande crue stockée au-dessus d’aliments prêts à consommer, une erreur élémentaire de sécurité alimentaire qui augmente le risque de contamination croisée.
« Ces rapports servent d’outil de transparence important », explique Catherine Levesque, spécialiste de la sécurité alimentaire qui examine régulièrement les données du MAPAQ. « Les clients méritent de savoir si les endroits où ils dépensent leur argent suivent les protocoles d’hygiène de base. »
Le district du Plateau-Mont-Royal a connu la plus forte concentration de violations ce trimestre, avec huit établissements ayant reçu des amendes. Parmi les infractions les plus courantes figuraient les stations de lavage des mains inadéquates et les employés manipulant des aliments sans équipement de protection approprié.
Lorsque j’ai appelé le porte-parole du MAPAQ, Jean-Philippe Normandin, au sujet des résultats, il a souligné que la plupart des restaurants respectent les réglementations. « Les amendes représentent un faible pourcentage du total des établissements », m’a dit Normandin. « Mais nous prenons chaque violation au sérieux car la santé publique est en jeu. »
Ce qui a attiré mon attention dans cette dernière série, c’est l’amende de 1 200 $ infligée à un brunch bien connu du Mile End pour avoir fonctionné sans permis valide de manipulateur d’aliments. Selon les règlements provinciaux, tous les établissements de restauration doivent avoir du personnel certifié supervisant la préparation des aliments.
Le restaurant, que je ne nommerai pas puisqu’ils ont depuis corrigé l’infraction, m’a dit que le lapse s’est produit pendant une transition de direction. « Nous avons mis en place un système de suivi pour garantir que toutes les certifications restent à jour », a expliqué leur directeur des opérations. « C’était une erreur administrative que nous avons corrigée. »
Pour les Montréalais ordinaires, ces rapports peuvent être difficiles à consulter. Le site officiel du MAPAQ répertorie les violations, mais trouver des informations sur des restaurants spécifiques demande de la persévérance. La blogueuse culinaire locale Marie-Claude Duchesne s’est constitué une communauté en rendant ces données plus accessibles.
« J’ai commencé à suivre ces rapports parce que je crois que les clients devraient avoir ces informations dans un format facile à trouver », a déclaré Duchesne. Son résumé mensuel des violations de restaurants compte plus de 15 000 abonnés. « Les gens veulent faire des choix éclairés, surtout en ce qui concerne la sécurité alimentaire. »
L’impact financier de ces amendes varie considérablement selon la taille de l’exploitation. Pour les petites entreprises familiales, même une pénalité de 750 $ peut représenter un fardeau important, tandis que pour les grands établissements, elle pourrait être absorbée comme un coût d’exploitation.
Selon les données de Restaurants Canada, la marge bénéficiaire moyenne des restaurants québécois tourne autour de 4,5 %, ce qui rend difficile l’absorption de toute dépense imprévue. Les initiés de l’industrie suggèrent que pour la plupart des établissements, les dommages à la réputation causés par les violations de santé publique dépassent de loin les pénalités monétaires.
Plusieurs propriétaires de restaurants avec qui j’ai parlé ont exprimé leur frustration face à ce qu’ils perçoivent comme une application incohérente. « Parfois, on a l’impression que les inspections dépendent de qui se présente ce jour-là », a déclaré un propriétaire de restaurant de St-Henri qui a reçu une amende de 500 $ pour des températures de réfrigération inappropriées. « Nous avons corrigé le problème, mais tout le processus semblait arbitraire. »
Les responsables du MAPAQ contestent cette caractérisation, soulignant leurs protocoles d’inspection standardisés et leurs programmes de formation pour tous les inspecteurs de la sécurité alimentaire.
L’agence a effectué environ 780 inspections à Montréal au cours du premier trimestre 2025, résultant en 42 amendes. L’analyse statistique montre que cela représente une légère diminution par rapport à la même période l’année dernière, lorsque 51 pénalités ont été émises.
Pour les consommateurs qui se demandent comment utiliser ces informations, l’experte en sécurité alimentaire Levesque recommande de regarder au-delà de la présence de violations. « Ce qui compte, c’est le type de violation et s’il s’agit d’un modèle récurrent. Une seule amende administrative est différente des infractions critiques répétées à la sécurité alimentaire. »
Les implications pour la santé publique vont au-delà des clients individuels. Le Dr Martin Rochette, épidémiologiste à la Santé publique de Montréal, note que les épidémies de maladies d’origine alimentaire créent des effets d’entraînement dans tout le système de santé. « Chaque cas évitable nécessitant une attention médicale exerce une pression supplémentaire sur des ressources déjà limitées », a expliqué Rochette lors d’un récent forum de santé publique.
Les défenseurs de l’industrie de la restauration soulignent que la plupart des établissements travaillent avec diligence pour maintenir des normes appropriées. « La grande majorité des restaurateurs sont profondément engagés dans la sécurité alimentaire », déclare Jean-François Archambault, directeur de La Tablée des Chefs. « Ils comprennent que leur gagne-pain dépend du maintien de la confiance des clients. »
Certains propriétaires de restaurants montréalais ont commencé à afficher volontairement leurs résultats d’inspection près des entrées – une pratique obligatoire dans certaines villes nord-américaines mais facultative au Québec. L’initiative de transparence a été accueillie positivement par les clients, selon les restaurants participants.
Le MAPAQ continue de faire évoluer son approche de l’application de la sécurité alimentaire. À partir du mois prochain, l’agence mettra en œuvre un nouveau système d’inspection basé sur les risques qui alloue plus de ressources aux établissements ayant des antécédents de violations ou à ceux servant des aliments à haut risque.
Pour les Montréalais qui s’interrogent sur leurs restaurants préférés, la base de données publique du MAPAQ reste la ressource la plus complète, bien que la navigation nécessite un peu de patience. Et bien que 6 000 $ d’amendes puissent sembler substantiels, cela ne représente qu’une fraction des centaines d’établissements alimentaires opérant sur l’île.
En fermant mon ordinateur portable après avoir examiné ces rapports, je ne pouvais m’empêcher de penser aux plans de dîner. Vérifierais-je l’historique des inspections avant de choisir un restaurant ce soir? Probablement pas. Mais je suis reconnaissant que l’information existe pour ces moments où nous voulons plus que de simples recommandations de menu avant de décider où manger.